d’ajouter que tous ceux qui n’en font pas partie ne font pas leur devoir. » Il y a quelques mois enfin, au Congrès que la Ligue tenait à Rennes, le directeur actuel de l’enseignement primaire eut à lui porter le salut du cabinet Brisson : « Il est bon, déclara-t-il, qu’il y ait une assemblée libre de ses allures, qui n’ait à compter ni avec les nécessités législatives ni avec les nécessités budgétaires, qui puisse soulever toutes les questions, même celles dont la solution ne pourra venir que dans un avenir très lointain. Ce rôle, c’est la Ligue de l’Enseignement qui s’en est magistralement emparée. Elle est une assemblée quelque peu révolutionnaire ; mais l’administration n’a pas peur d’elle, parce qu’elle sent en elle une amie et une alliée. C’est un plaisir pour un administrateur d’entendre dire tout haut, par les orateurs de la Ligue, ce que souvent il pense tout bas, mais ce qu’il n’a pas la permission de dire. Ce plaisir, je l’ai très vivement éprouvé depuis deux jours, et, sur une ou deux questions, je me disais en moi-même que, si j’avais le droit de parler, je serais peut-être encore plus révolutionnaire que les membres de la Ligue. En tout cas, le précieux avantage de ce commerce d’amitié et de conversations entre la Ligue et l’administration, c’est que nous pouvons voir les idées entrer ainsi dans la circulation, se préciser, se discuter, et calculer le moment, lorsqu’elles auront été bien pesées et examinées, où il sera possible de leur donner la forme d’un décret ou d’un arrêté. » Il y avait là, sur les lèvres du chef officiel des instituteurs de France, comme une ratification discrète des vœux émis au Congrès ; or, parmi ces vœux, figurait le vœu Pochon. La Ligue de l’Enseignement est comme le comité d’initiative où l’État enseignant vient s’instruire.
Si cette société sait emprisonner, dans le réseau de ses maximes intolérantes, les plus hauts fonctionnaires de l’Université, comment espérer que, dans chaque arrondissement, l’instituteur se puisse soustraire à l’influence absorbante du comité local de la Ligue ? Bien loin de s’y soustraire, il s’y livre ; un enthousiasme juvénile, un dévouement parfois sans bornes, des espérances qui commandent le respect lors même qu’on ne les partage point, entraînaient cet instituteur à travailler gratuitement, en dehors de ses heures de classe, à l’éducation des adultes ; et son labeur, en fait, est usurpé par un parti politique. Le seul nom de M. Léon Bourgeois, longtemps président de la Ligue, définit ce parti ; et le Bulletin de la Ligue, en 1896, citait avec joie ces lignes d’un