qu’il allait faire tenir au Roi, en invoquant, à Londres et à Paris, l’immense agitation provoquée en Italie par les paroles du 1er janvier. « Après nous avoir recommandé la prudence pendant six mois, écrivait-il au marquis d’Azeglio, l’Empereur a débuté cette année par une algarade qui rappelle la manière de son oncle à la veille de ses déclarations de guerre. Les paroles qu’il a adressées à Hübner, le silence glacial avec lequel il a accueilli le nonce, vont produire en Italie un effet incroyable. Je ne sais trop ce qui s’ensuivra. Je ne crois pas que nous puissions rien attendre de sérieux de l’Angleterre. Contentez-vous de pousser des soupirs, de vous lamenter sur l’horrible position que font au pauvre Piémont l’ingratitude et la stupidité des hommes d’État anglais. Leur conduite nous pousse dans les bras de la France. » Au prince Napoléon il écrivait à la même date, le 5 janvier : — « Je profite du départ du général Klapka pour vous prier de hâter, autant que possible, votre retour à Turin. Le Roi est très désireux de voir Votre Altesse ; qu’Elle veuille bien ne pas se faire trop attendre. D’ailleurs les événemens pressent, l’agitation grandit en Lombardie, à Milan surtout. Les quelques mots adressés le premier de l’an à Hübner ont provoqué ici une immense exaltation. Les plus modestes voient déjà la France traversant le Pô et rasant les Autrichiens. Cet état n’est pas sans danger. Que faire, si un mouvement populaire éclatait en Lombardie ! C’est difficile à dire. Lorsque Votre Altesse sera ici, nous pourrons tout prévoir et être préparés à toutes les éventualités. Votre Altesse connaît Klapka ; il est inutile que je le lui recommande. Je souhaite que ses plans soient approuvés par l’Empereur et qu’il lui fournisse les moyens nécessaires pour les exécuter. S’ils réussissaient, c’en serait fait de l’Autriche ; elle perdrait l’Italie et ses provinces magyares et slaves. »
Les inquiétudes un instant calmées reprirent de plus belle ; on se voyait à la veille d’une guerre de caprice ou de système. M. Doudan, qui suivait et caractérisait les événemens avec sa philosophie caustique, écrivait au prince de Broglie, son ancien élève :
« Jamais bombe tombant dans une salle à manger n’a fait plus d’impression que le petit discours de l’Empereur à l’ambassadeur d’Autriche. Il avait certainement ses raisons ; car, du moins jusqu’à présent, il n’était pas sujet à l’entraînement de la parole. Eût-il résolu la guerre, la plus simple prudence voulait qu’il laissât dormir tout le monde, afin de pousser ses préparatifs avec