que telle découverte change complètement les conditions mêmes de la guerre, soit sur terre, soit sur mer, et permette à celui qui, la veille, était relativement faible de trouver, le lendemain, des moyens de défense devant lesquels la force de l’agresseur peut être singulièrement et pour longtemps diminuée.
Veut-on un exemple ? Il en est un qui se présente aussitôt à l’esprit. On a mené grand bruit en France, depuis quelques jours, autour des essais qui ont été faits dans la Méditerranée d’un bateau sous-marin, ou d’un bateau plongeur. Que vaut exactement cet engin nouveau ? Nous n’en savons rien. Le bateau sous-marin n’a peut-être pas tous les mérites qu’on lui attribue ; mais peut-être les aura-t-il un jour ; et, dès lors, qui ne voit les conséquences ? On aura beau dire que toutes les puissances maritimes posséderont bientôt le même engin : il n’en est pas moins vrai que, même alors, les conditions de la guerre maritime ne seront plus les mêmes, et que certaines choses, qui sont actuellement possibles, cesseront de l’être. Un cuirassé peut, aujourd’hui, en se tenant à une grande distance des côtes, les accabler sous ses projectiles : cela lui sera plus difficile, lorsque les côtes pourront se protéger avec ces torpilleurs perfectionnés et à peu près invisibles. Certaines mers de médiocre largeur deviendront absolument intenables pour les cuirassés. Tout le monde y perdra peut-être en force agressive, mais chacun y gagnera en force défensive, et c’est un grand point pour quelques-uns. Telle puissance qui, présentement, serait tentée de se lancer dans la guerre résistera mieux à une tentation qui l’exposerait à une aventure de plus en plus incertaine. À ce point de vue, l’invention des bateaux sous-marins, en rendant la guerre plus aléatoire, la rendra vraisemblablement aussi moins fréquente. Au surplus, n’est-ce pas le résultat de toutes ces inventions qui, en perfectionnant les moyens de combat dans des proportions redoutables, font reculer les gouvernemens au moment de les employer ? Non pas que la guerre en devienne plus meurtrière. Ce n’est pas le résultat que les dernières expériences ont permis de constater. La guerre d’autrefois, qui était faite presque d’homme à homme, était autrement sanglante que la guerre moderne, où on opère par grandes masses. Elle se fait aujourd’hui plus scientifiquement. Son but, qui est de manifester avec évidence la supériorité du plus fort, est atteint plus vite et généralement à moins de frais. Ces conséquences dérivent des perfectionnemens apportés peu à peu aux moyens d’attaque et de défense de nos armées. À mesure que s’est accompli ce progrès, qui, à première vue, paraît atroce, puisqu’il a pour effet d’augmenter la