Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 151.djvu/710

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont à la tête d’une grande partie des plantations. Ce sont les commerçans qui ont d’abord prospéré. Dans l’incessante obligation d’échanger leurs importations ou leurs capitaux contre le café, la principale production du pays, ils ont été vite amenés à l’idée de faire eux-mêmes de l’exploitation agricole. Ils ont ainsi joint une opération de plus à leur ensemble d’affaires. Ils ont donc acheté et défriché des terrains et, en fin de compte, créé de multiples plantations de café. Le tout fait naturellement avec des capitaux allemands et par des Allemands. J’aurai donné une idée précise de cette prospérité commerciale et agricole en disant que, en 1896, sur 521 000 quintaux de café exportés du Guatemala en Europe, 403 000 ont été expédiés sur Hambourg. 16 000 quintaux seulement sont venus en France. Encore convient-il de dire que, sur les 102 000 quintaux, expédiés en Angleterre, une partie l’a été par des Allemands.

On retrouverait en quelques autres pays de semblables colonies composées, en partie de commerçans, en partie d’agriculteurs ; mais il faut dire que c’est l’exception. La colonie simplement commerciale est la généralité.

Tels que nous venons de les décrire, ces groupes d’Allemands constituent donc bien de véritables colonies, intégrantes à ces républiques américaines ; colonies plus importantes par la richesse et l’influence que par le nombre ; émanations fidèles de la mère patrie dont elles reçoivent aide et crédit, et à la prospérité de laquelle elles-mêmes contribuent.

Tout se tient, en effet. Par l’intermédiaire des colons, les industries allemandes trouvent des débouchés considérables. Leurs produits, fabriqués d’après les indications fournies par eux, adaptés aux goûts et aux besoins des pays auxquels ils sont destinés, s’écoulent, au grand profit de chacun. Par la même cause, les ports d’Allemagne sont devenus d’importans points d’arrivages et de marché pour les productions coloniales. Et, naturellement, tout ce mouvement d’échanges est fait par des navires allemands, dont on voit presque partout flotter les pavillons.

Ainsi se fondent ces colonies d’Allemands, simplement commerciales ; sans territoires à garder, à protéger ou à défendre ; sans administration coûteuse, sans entretien de magistrats, de militaires et de fonctionnaires de toute sorte ; en un mot, des colonies qui ne nécessitent aucun frais, aucun souci et profitent entièrement aux colons allemands et à leur mère patrie ; colonies dont l’historique et l’organisation offrent un intérêt si évident.