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ont conservé un intérêt scientifique, et c’est ce qui nous justifiera d’en évoquer le souvenir. Les expériences nouvelles de M. L. Boutan, si elles ne doivent pas avoir d’autre résultat, auront au moins celui-là : elles auront jeté un peu plus de lumière sur l’histoire naturelle de la perle.

Il faut bien avouer que cette histoire est mal connue. Si l’on doutait de notre ignorance scientifique à cet égard, il suffirait de se reporter à cette séance de l’Académie du 21 novembre dernier, dans laquelle M. de Lacaze-Duthiers a communiqué à ses collègues le résultat des recherches de M. Boutan, — et surtout à la discussion qui a suivi cette présentation. Des naturalistes, des chimistes, des navigateurs y ont pris part, et ont dit chacun leur mot. Et, après tout cela, nous ne savons pas encore, de façon certaine, quel est l’organe de l’huître perlière qui produit la perle. Les uns ont supposé implicitement que c’était une production du manteau, d’autres que c’était une concrétion du rein ; et l’opposition ou la co-existence de ces deux origines diverses attribuées aux perles, n’a même pas été mise en évidence. On a parlé de glandes et de sécrétion glandulaire d’une part, de production ou végétation épithéliale d’autre part, sans choisir entre ces deux mécanismes. On n’a pas décidé davantage si ces productions tendaient à être englobées dans la coquille ou à s’en séparer. Il ne semble pas, d’après cela, que l’on soit bien instruit du mécanisme intime de la formation de la perle et que l’on puisse se proposer d’imiter la nature dans cette opération autrement que d’une manière tout à fait empirique et par conséquent incertaine.


I

Le luxe des perles fines vient de l’Orient. De temps immémorial elles y étaient estimées à l’égal des plus belles pierreries. L’usage s’en est propagé lentement dans le monde occidental, à la suite des conquêtes d’Alexandre et de l’établissement de la domination romaine. Il n’a pénétré que tardivement en France, et bien qu’elles soient mentionnées, dit-on, dans les édits somptuaires de Philippe le Bel, la vogue n’en commença que trois siècles plus tard avec Henri III.

Les perles anciennes venaient de l’océan Indien, de la Mer-Rouge, et du golfe Persique. On s’explique donc que ce soient les Asiatiques, les Perses et les Égyptiens qui les aient connues les