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Le khédive Ismaïl ne tarda pas à trouver que le Conseil des ministres, présidé par Nubar-Pacha, et comprenant deux étrangers, constituait pour lui une gêne de tous les instans. Il essaya donc de se débarrasser de cette tutelle, convoqua à cet effet, en janvier 1879, l’assemblée des notables, prévue par la loi de novembre 1866 ; et nomma, au mois de mars, son fils Tewfik président du Conseil, à la place de Nubar-Pacha. Pour ne pas s’aliéner la France et l’Angleterre, il reconnut à leurs deux ministres un droit de veto collectif sur les décisions à intervenir. Mais la détresse du Trésor obligeait le ministre des Finances à proposer de différer le paiement du prochain coupon. Le Khédive, en violation de ses propres engagemens, chargea l’assemblée des notables de préparer un contre-projet, et nomma un nouveau Conseil des ministres exclusivement composé d’Égyptiens, sous la présidence de Cherif-Pacha. Aussitôt, les membres de la commission supérieure d’enquête donnèrent leur démission (10 avril 1879). Ismaïl passa outre, promulgua le 22 avril comme loi les résolutions dictées par lui à l’assemblée des notables, qui portaient une nouvelle atteinte aux droits des créanciers, sans leur offrir aucune compensation. Les puissances protestèrent les unes après les autres. La France et l’Angleterre ne se bornèrent pas à cela ; elles exigèrent l’abdication du Khédive : le 26 juin 1879, Ismaïl fut, en vertu d’un iradé du Sultan, remplacé par son fils Mehemet-Tewfik-Pacha, qui devait régner treize ans sur l’Égypte.


III. — TROISIÈME PÉRIODE (1879-1882)

Nous entrons dans la troisième période. Le principal obstacle aux réformes et à l’intervention européenne est écarté. Le nouveau souverain a vu de près ce qu’il en coûte à celui qui règne au Caire de vouloir éluder les engagemens pris ; il est résigné à subir les lois de l’Europe ; il a souscrit d’avance aux conditions que dicteront les deux grandes puissances occidentales, dont les nationaux sont le plus largement intéressés dans les fonds égyptiens. Aussi la situation financière va-t-elle faire l’objet d’un règlement qui, cette fois, a toutes chances d’être définitif, parce que, d’une part, il sera assis sur les bases que l’expérience aura démontrées admissibles, et que, d’autre part, la mauvaise foi de l’un des deux contractans ne viendra pas tout remettre en question. Le premier soin du ministère fut de déclarer nul l’acte du