l’intérêt suprême de l’État, l’avenir de sa famille, le Piémont et l’Italie tout entière lui conseillent. »
Le ministre prêchait un converti, car, il le savait de reste, le parti du Roi était pris. Et, en effet, si, sur une table d’auberge, il rédigeait un aussi volumineux rapport, qui de quelques heures seulement devait précéder sa rentrée à Turin, ce n’était pas pour les archives secrètes de la maison de Savoie, mais pour réserver à la politique italienne une arme dont elle pourrait se servir un jour contre celui qui venait de se livrer si inconsidérément.
Le 31 juillet, M. de Cavour rentrait à Turin ; sa joie débordante annonçait que les temps étaient proches.
Le comte Pasolini a raconté que, peu de jours après, son père, qui avait été ministre de Pie IX en 1847, et en conséquence avait ses entrées au Vatican, fut invité par M. de Cavour à venir le voir à cinq heures du matin. Le rendez-vous était plus que matinal. Il est des ministres, — M. Thiers était de ce nombre, — qui tiennent à ce qu’on sache qu’ils sacrifient leur sommeil au bien de l’État ! À peine M. Pasolini fut-il assis, que le président du Conseil s’écria, en se frottant les mains : « Enfin, nous y sommes ! le prince Napoléon épouse la princesse Clotilde ! Je suis sûr de l’assistance de la France, et l’Italie est prête pour la révolution ! » Le comte Pasolini n’en crut pas ses oreilles et se demanda s’il avait affaire à un dément ! — « Eh quoi ! s’écria-t-il, vous voulez faire la guerre ! Ne craignez-vous pas de tout perdre ? » Le ministre, pour le tranquilliser, lui exposa son plan ; il lui démontra que la lutte resterait circonscrite entre le Piémont allié de la France et l’Autriche.
— Et le Roi approuve-t-il votre politique ? demanda M. Pasolini.
— Le Roi. s’écria Cavour, vous le connaissez peu : il a besoin d’être retenu et non d’être poussé. Si je vous ai fait venir, c’est pour que vous m’aidiez ; noms êtes l’ami du Pape, faites-lui comprendre que Les Autrichiens ne resteront pas toujours en Italie et que le vicariat du Piémont dans les Romagnes pourrait bien être son salut.
— J’ai déjà parlé au Pape à Bologne ; Minghetti sait comme