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des conséquences du principe adopté ; ses effets n’ont pas été moins sensibles sur la disposition intérieure et l’aménagement des locaux ; si l’on a conservé dans quelques phares d’ancien style les chambres, voire les salons particuliers destinés aux ingénieurs et aux inspecteurs, ce déploiement de canapés, de meubles d’acajou, de lambris, de cadres à l’anglaise, pour des visites qui durent une heure en moyenne, a semblé lui-même un peu excessif ; on le supprime généralement dans les nouveaux phares.


IV

Sitôt débarqué du baliseur, le gardien commence son service. Il prend possession de sa petite chambre, dépose ses provisions dans son garde-manger spécial, balaye, frotte, astique, savonne, etc. Ce nettoyage va de bas en haut, du rez-de-chaussée à la lanterne, en passant par la chambre des appareils. Il faut épousseter les bidons, les verres, les glaces, les cornets, les lampes de rechange ; il faut renouveler l’huile, imbiber les mèches, dégager l’obturateur…

Toutes ces opérations préliminaires ont pour conclusion l’allumage. Pendant le jour, des stores blancs à bandes rouges sont abaissés sur les glaces ; on les relève au crépuscule : c’est le démasquage. L’homme fait jouer un ressort qui met en mouvement l’appareil optique circulaire. Il pénètre ensuite dans la cage de la lanterne, qu’il allume d’abord à petite flamme et dont il hausse graduellement les mèches à mesure que la nuit tombe. Quand elles dépassent la couronne du bec, la flamme a pris tout son éclat ; la pleine nuit est venue, mais la tâche du gardien n’est point terminée. Le quart est de règle dans tous les Isolés. Ce quart dure de la chute du jour à minuit, et le quart suivant de minuit au lever du jour. L’homme qui le fait n’est pas tenu de rester debout comme à bord. Dans le fauteuil que lui concède l’administration il peut s’asseoir, coudre, rêver, mais sous condition de surveiller attentivement le feu, et non seulement le sien, mais encore celui des autres phares visibles sur l’horizon. Il doit noter le temps qu’il fait, les navires qui passent, le degré de transparence de l’air, les incidens de toutes sortes qui viennent rompre la monotonie de sa faction. Réglementairement, et à cause de l’éclat du foyer, il porte des lunettes noires. Quand la fin de son quart approche, il appuie sur un timbre dont la sonnerie court réveil-