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LES ANGLAIS AU SOUDAN
ET LA
QUESTION D’ABYSSINIE


I

Depuis le temps d’Hérodote jusqu’à nos jours, tous les peuples civilisés se sont proposé de résoudre le problème des origines du Nil, ce fleuve des fleuves, l’Ægyptos d’Homère. Les Égyptiens l’ont divinisé, parce que, après avoir créé la terre des Pharaons, il la féconde, il lui accorde à son gré l’abondance ou déchaîne sur elle la disette, et parce qu’avec son delta, il donne à l’Égypte l’immense importance géographique qu’elle a conservée à travers le cours de tant de siècles.

On peut dire qu’au temps des Romains, on connaissait assez exactement les origines du Nil Blanc, puisque Ptolémée le fait venir de trois marais ou lacs, situés non loin des lacs équatoriaux. Mais, ensuite, les notions sur les origines du Nil allèrent s’obscurcissant, non pas que l’on eût oublié l’idée de Ptolémée, mais parce que dans le domaine des connaissances géographiques étaient entrés aussi les cours d’eau qui descendent de l’Abyssinie et qui forment les deux bassins particuliers du Nil Bleu et de l’Atbara.

Le problème se compliqua alors, s’élargit et se compléta : les nombreux points d’interrogation reçurent pourtant peu à peu une réponse des voyageurs qui se succédèrent et des expéditions scientifiques et militaires. Le sphinx géographique a maintenant laissé tomber tous ses voiles, tandis qu’il apparaît clairement que quiconque est maître du bassin supérieur du Nil domine non