cauchemar du fabricant. Il est introduit ensuite dans des appareils de capacité variable, — celui que j’ai sous les yeux, le plus vaste qui existe en France, contient 77 500 litres, — chauffés par deux tuyaux de cuivre déroulant, parmi la masse du liquide, leurs anneaux monstrueux où la vapeur entre à 155° centigrades, et d’où elle ressort à l’état d’eau. Comme mesure de précaution et pour le cas où l’alcool s’infiltrerait, par une fuite quelconque, dans l’un des tuyaux, ceux-ci communiquent avec un étroit échappement à l’orifice duquel est une lampe toujours allumée. Là, les vapeurs alcooliques, s’il en existe, s’enflamment d’elles-mêmes à leur sortie et le vice se trouve immédiatement signalé.
Sitôt l’alambic en marche et commençant à couler, surviennent les éthers ou aldéhydes, si faciles à évaporer qu’ils bouillent à 20° de chaleur, l’acétone et l’acroléine, ou alcool qui fait pleurer. C’est la « tête, » de peu d’importance toujours comme volume. Avant que le thermomètre s’élève à 60°, elle est partie tout entière. On n’en saurait rien tirer de comestible et elle est simplement dénaturée en vue d’usages industriels.
Puis se présentent, dans la proportion et l’ordre suivant, les « mauvais goûts de tête, » — 17 pour 100 environ, — qui sont renvoyés dans les bacs pour être de nouveau rectifiés ; les « moyens goûts » ou « alcools au cours, » ainsi nommés parce que c’est à ce type que correspondent les prix côtés en Bourse ; les qualités plus fines bénéficiant d’une prime variable. Ensuite viennent l’ « extra-fin » et le « cœur, » que parfois l’on mélange sous le nom de« tout-venant bon goût, » — à peu près 60 pour 100 de la quantité. — Après quoi commencent les moyens et mauvais goûts de « queue. » La « queue, » ce sont les huiles essentielles, fusel öle suivant le mot allemand usité, des valérianates, des butyrates, du furfurol, toutes substances plus ou moins nocives.
Elles n’ont point été portées à l’ébullition, car elles ne se volatilisent que depuis 160 jusqu’à 240° de chaleur ; d’où le nom d’alcools supérieurs sous lequel on les désigne ; mais elles ont été entraînées mécaniquement par les vapeurs alcooliques et les ont suivies jusqu’au sommet de la colonne distillatoire. S’il est relativement facile de se débarrasser des produits de tête, il n’en est pas de même des « queues, » qui, malgré leur faible dose, — mille hectolitres de flegme renferment à peine un hectolitre d’huile, — encombrent jusqu’à la fin la marche de l’appareil.
Cette « série grasse, » quintessence de la betterave ou des