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comme les ont représentés certaines gravures, tels qu’ils étaient projetés. Cette monographie dont M. Gille a puisé aux sources mêmes les élémens, est donc aussi exacte qu’elle est belle, et, d’après les premiers chapitres comme par les dessins et planches en couleur et relevés de M. Marcel Lambert, d’une grande allure et d’une exécution parfaite, on peut augurer que l’ouvrage complet pourra supporter la comparaison avec les plus remarquables monographies de Versailles exécutées du temps de Louis XIV lui-même.

Nec pluribas impar, — il suffit à plusieurs, — et c’est encore de Versailles qu’il sera le plus souvent question dans le Dix-huitième Siècle[1]. Après le siècle de Louis XIV, qui a produit un art nouveau dans sa splendeur, d’une majesté et d’une élégance bien conformes au génie français, et dont le château de Versailles est le plus beau monument, il est intéressant d’interroger le XVIIIe siècle, qui fut par excellence le siècle de l’esprit et de la discussion, des grâces et des amours, des philosophes et des salons. Au Grand-Trianon de Louis XIV a succédé le Petit-Trianon de Louis XV, de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Entre tous ceux qui peuvent nous faire admettre dans l’intimité du Roi, des grands personnages de ces règnes, des habitués de la Cour, quels meilleurs guides pourrions-nous trouver que les représentans de cette société brillante et dissipée ? Les voilà bien tous réunis, ces hommes du dernier siècle, en une galerie où l’on va de l’un à l’autre, où l’on écoute parler ceux mêmes qui l’ont illustré, les représentans qui y ont vécu et dont les confidences ou les anecdotes sont plus instructives que bien des dissertations érudites. A côté de physionomies charmantes de femmes intelligentes et frivoles, ceux qui ont vu les grandes luttes du siècle, ont pris part aux plaisirs de la Régence, du règne de Louis XV, aux bergeries de Trianon, ont contribué au mouvement mondain ou philosophique, ont combattu avec Voltaire, Rousseau, Diderot, préparé la Révolution et assisteront aux scènes de la Terreur. Saint-Simon, Duclos pour la Régence ; d’Argenson, l’avocat Barbier, le duc de Luynes, Rousseau, Voltaire, Montesquieu, Marmontel, Bachaumont pour le règne de Louis XV ; Bezenval, Mme de Genlis, Mme du Hausset, Mme Campan pour l’époque de Marie-Antoinette : tels sont les auteurs qui nous disent ce qu’ils ont vu, les événemens auxquels ils ont été mêlés.

Comme les plus belles pages de ces auteurs, les meilleurs exemplaires de l’art d’autrefois sont rassemblés à l’aide des meilleurs

  1. Le Dix-huitième siècle, 1 vol. gr. in-8o, illustré de 40 planches en taille-douce et de 500 gravures. Hachette.