Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 150.djvu/809

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lendemain 9 octobre à l’Hôtel de Ville, avant la séance du Conseil municipal, ils y furent reçus par le Bureau du Conseil, qui s’était adjoint MM. Humblot, Boreux et Bechmann, ingénieurs, chefs des services des eaux, de la voie publique et des égouts. Après une discussion assez longue, les présidens des chambres syndicales se retirèrent et le préfet de la Seine fut appelé. Le Bureau délibéra ensuite à huis clos sur les propositions à soumettre au Conseil municipal. En séance, après avoir donné lecture des propositions des entrepreneurs, le président mit aux voix le projet de résolution suivant : « Le Préfet de la Seine est invité à procéder d’urgence à la résiliation de tous les marchés de travaux publics passés avec la Ville de Paris. » A la suite de protestations nombreuses, et après discussion, en comité secret, de deux contre-propositions de MM. Bassinet et Le Breton, le Conseil adopta la proposition suivante :


Le Conseil, considérant que le conflit survenu entre les entrepreneurs et ouvriers du bâtiment et des grands travaux publics compromet l’intérêt général et l’ordre public ;

Vu l’urgence des travaux en suspens et le droit supérieur de l’autorité municipale, tel qu’il résulte du contrat même, délibère :

ARTICLE PREMIER. — M. le Préfet de la Seine est invité à mettre les entrepreneurs en demeure de reprendre les travaux municipaux dans un délai de vingt-quatre heures.

ART. 2. — Vu l’urgence, M. le Préfet de la Seine mettra en régie lesdits travaux aux risques et périls des entrepreneurs non exécutans.

ART. 3. — Subsidiairement, le Préfet est autorisé à résilier à l’amiable les marchés eu cours, au mieux des intérêts de la Ville de Paris et de l’ordre public.


La résolution fut votée par 53 voix contre 1.

Cette mesure radicale mettait fin au conflit, puisque le Conseil municipal se chargeait lui-même, en cas de refus des entrepreneurs, de donner satisfaction aux terrassiers en leur assurant les prix de la Ville de Paris.

Les arrêtés furent signés par le préfet de la Seine le dimanche 9 octobre, et notifiés le même jour ; les entrepreneurs avaient vingt-quatre heures pour remettre leurs chantiers en activité : passé ce délai, les ingénieurs devaient en prendre possession pour faire exécuter les travaux en régie. « Cette régie anormale, explique le préfet, s’applique uniquement à la main-d’œuvre des terrassemens, et les entrepreneurs restent soumis aux obligations de leurs marchés en ce qui concerne la surveillance et la