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l’importance, qui paraît d’abord singulière, de certains livres de controverse dans notre histoire. Les Provinciales de Pascal ont une portée politique qui égale, si même elle ne le dépasse, leur intérêt théologique.

Au début du XVIIe siècle, la querelle du protestantisme et du catholicisme se poursuivait simultanément dans les faits, l’épée au poing, et dans les livres, la plume à la main. Les gouvernemens ne pouvaient s’y montrer indifférens. Le roi Jacques était un polémiste. Henri IV, débonnaire, présidait aux laborieuses discussions de textes engagées entre un Du Perron et un Duplessis-Mornay. Les femmes y assistaient. Tout le monde écoutait ces disputes scolastiques, sans les bien comprendre peut-être, mais avec le plus vif intérêt, car il y allait pour chacun non seulement de la cause religieuse à laquelle il appartenait, mais du parti dans lequel il s’était engagé corps et biens.

Vue sous cet angle, la littérature de controverse qui encombre les bibliothèques du XVIIe siècle s’éclaire de son vrai jour. Quand Bossuet écrit l’Histoire des Variations des Églises protestantes, il est en harmonie avec le gouvernement qui vient d’accomplir la révocation de l’Edit de Nantes.

Dans ces luttes séculaires, la Compagnie de Jésus combattait au premier rang. L’ordre, ou plus exactement « la Compagnie, » avait été créée pour la bataille. Elle bataillait courageusement. Quand il y a des coups à donner ou à recevoir, on est bien sûr de trouver un jésuite dans l’affaire, — qu’il s’agisse des chefs éminens comme Bellarmin ou Cotton, ou des enfans perdus comme Le Moine ou Garasse.

Le Père Cotton, dont nous venons de prononcer le nom, avait joué un rôle décisif dans les événemens qui avaient permis à la Compagnie de s’introduire en France, vers la fin du XVIe siècle. La chose s’était faite comme par miracle. Quand les bons pères, au fort des guerres de religion, amorcèrent leur entreprise, tout le monde y paraissait contraire. Et, cependant, en quelques années, Henri IV, protestant de la veille, leur ouvrait toutes grandes les portes du royaume. Avant de mourir, il leur léguait son cœur pour être gardé dans leur maison de la Flèche.

Le Père Cotton, qui avait tant contribué à ce succès, conserva, jusqu’à la mort de Henri IV, une réelle influence sur ce prince. On disait à la cour que le Roi avait du coton dans les oreilles. Après l’assassinat il resta le confesseur du jeune roi et de la