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coulé en couches de couleurs diverses de façon à obtenir ensuite par la gravure des effets de camées. C’est ainsi, notamment, qu’ont été exécutés le fameux vase de Portland, du British Muséum, et le vase des vendanges du musée de Naples, œuvres admirables, dans lesquelles l’art des anciens apparaît dans toute sa perfection, et qui restent des exemples qu’on cherche à atteindre encore maintenant, mais qui ne seront sans doute pas surpassés. Au surplus, sans considérer les qualités d’art du verre ancien, sans nous arrêter au procédé si particulier avec lequel les décors en creux et en relief étaient obtenus par la gravure qui parvenait à donner l’illusion du camée le plus délicat, et pour nous en tenir spécialement au côté technique des choses, on peut dire que les colorations antiques furent à peu près aussi nombreuses que celles d’aujourd’hui. Les oxydes métalliques employés par les égyptiens, les Grecs et les Romains, ou nos verriers du moyen âge, sont les suivans : oxydes de fer, oxydes de cuivre, peroxyde de manganèse, oxyde de cobalt. Depuis nous avons ajouté les oxydes de chrome (pour certains verts) et les sulfures de sodium (pour certains jaunes), à la suite des recherches de l’éminent chimiste J. Pelouze. On se sert également dans quelques cas des sels d’urane, puis des sels de nickel pour obtenir les verres fumés : là se bornent les progrès modernes. Les sels de fer continuent à donner les tons verts, on n’a pas cessé de demander aux sels de cuivre les verts, les bleus, les rouges, ou les verres veinés de rouge, de vert, de brun, etc., suivant leur degré d’oxydation, ou selon le mélange combiné de fer et de cuivre[1]. Quant aux applications du verre, elles furent à coup sûr on ne peut plus diverses dès les temps les plus reculés. Les nombreux fragmens trouvés dans les tombeaux égyptiens de la quatrième dynastie témoignent de la variété des usages auxquels il servait. Non seulement on en faisait des objets de parure, des perles, des pendans d’oreille, des ornemens de corsage, imitant à s’y méprendre les pierres précieuses, les topazes, les rubis, etc., mais encore des vases funéraires, des récipiens pour les vins, des coupes, des plaques moulées ou coulées, représentant en relief des symboles, des masques comiques ou tragiques, etc. Les femmes élégantes aimaient à jouer avec des boules de verre pour entretenir la fraîcheur de leurs mains, ou bien elles piquaient dans leur

  1. Note sur les Verres des Vitraux anciens, par L. Appert (Gauthier-Villars, 1896).