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importance, les autres ne font que traverser pour entrer dans le Salon de service dont la porte est gardée par un huissier. Là, l’ameublement est de tapisserie de Beauvais : chaises pour les princesses, tabourets en X pour les dames de qualité. Pour faire les honneurs et recevoir les gens, le chambellan de jour, en habit de soie ou de velours, rouge, brodé d’argent, en culotte et veste blanche, portant sur la basque de l’habit l’insigne de ses fonctions : une clef en vermeil montée sur un nœud de rubans bleus à lisérés et glands d’argent : cette clef, sans panneton, a l’aigle couronné dans l’anneau et, sur le collet, un écusson avec la lettre J. L’écuyer de service, en habit bleu de ciel brodé d’argent, entre seul en bottes dans le salon où ont droit de pénétrer les officiers de la Maison de l’Impératrice ; la dame d’honneur qui y a le commandement suprême, la dame d’atour, les dames du Palais, le chevalier d’honneur, le premier écuyer et les chambellans ; puis les officiers et aides de camp de service près de l’Empereur : puis les princes et princesses de la famille Impériale, les grands officiers de la couronne et les dames épouses des grands officiers de l’Empire. La distinction est curieuse : ainsi, Madame de Talleyrand, si elle venait aux Tuileries, ne pourrait entrer dans le Salon de service comme femme du Grand chambellan et elle y entrerait comme femme du ministre des Relations extérieures. On ne raisonne point : c’est l’étiquette.

Une porte double encore et un huissier, c’est le salon de l’Impératrice dont le meuble est en tapisserie des Gobelins : fauteuil pour elle, fauteuil pour l’Empereur, et, par grâce spéciale, pour Madame Mère ; chaises pour les princesses, tabourets pour les autres ; une table que, à des jours, pour les sermens, on couvre d’un tapis de velours vert brodé d’or ; puis, contre les murs, des meubles à demeure et qu’on ne bouge point !

Le chambellan, après avoir gratté à la porte et pris les ordres, introduit près de l’Impératrice les personnes auxquelles elle veut parler : celles qui ont des lettres d’audience ou celles qui, comme les princesses, la dame d’honneur et la dame d’atour, ont le droit de venir la trouver où qu’elle se trouve. L’huissier manœuvre les battans de sa porte et a bien soin de n’ouvrir les deux qu’aux altesses impériales.

Tel est l’essentiel de l’Appartement d’honneur ; tel est le cadre nécessaire de la vie extérieure ; tel en est le personnel obligé, aux