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américain. M. Sagasta n’a pas voulu garder la responsabilité pour le gouvernement seul dans des circonstances aussi graves : il a consulté les chefs de partis, les hommes politiques importans, et presque tous ont reconnu que la paix était nécessaire. Les républicains et les carlistes ont refusé de se prononcer. M. Romero Robledo et le général Weyler ont demandé la guerre à outrance ; mais ils ont été seuls de leur avis. On peut donc regarder, dès aujourd’hui, la paix comme certaine. Ses bases seront les suivantes : indépendance de Cuba, cession de Porto-Rico et d’une île du groupe des Ladrones, évacuation immédiate des Antilles, institution d’une commission hispano-américaine qui déterminera le régime ultérieur des Phillippines. La question des Philippines sera la plus difficile et la plus longue à régler, et celle aussi qui pourrait, en dehors de l’Espagne et des États-Unis, amener des complications d’un ordre plus général. Il convient de surveiller attentivement les autres puissances qui ont, ou qui croient avoir, ou qui désireraient se créer des intérêts dans le vaste archipel de l’Extrême-Orient, et auxquelles l’initiative des fils de Monroë, débordant si loin de l’Amérique et sur les chemins de nouveaux continens, pourrait bien servir d’aiguillon. Mais nous n’avons pas à devancer les négociations ; elles n’en sont qu’à leur premier pas. Le gouvernement de Madrid demande un armistice ; on ne saurait plus le refuser, puisque la paix est assurée par le consentement de tous les partis constitutionnels en Espagne, et que la prolongation de la guerre, n’ayant plus d’objet, serait une inutile effusion de sang.


FRANCIS CHARMES.