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Ces statuts se passent de commentaires. Si l’on ajoute que la majorité des actions sont aux mains du gouvernement russe, on voit qu’en dépit d’un président chinois de parade, la ligne de Mandchourie est entièrement entre les mains du ministre des finances russe. M. de Witte en a d’ailleurs été le principal promoteur et en a préparé les statuts, qui ne stipulent pas moins rigoureusement les obligations de la Société relativement à l’exploitation qu’en ce qui concerne la construction : capacité de transport égale à celle des voies sibériennes, transit des trains sibériens sans retard et avec la même vitesse que sur le territoire russe, tarifs fixés après entente avec le gouvernement russe, service postal transporté en franchise ; exemption de tous droits de douanes, etc. La seule réserve faite au profit de la Chine est un droit de rachat : « Après un délai de trente-six ans à dater du jour où la ligne sera achevée et complètement exploitée, le gouvernement chinois aura le droit de racheter cette ligne en se substituant complètement à la Société dans tous les capitaux déboursés et dans toutes les dettes faites pour les besoins de la ligne, y compris les intérêts composés... » Si la Chine n’use pas de cette faculté de rachat, et il n’y a guère de risque qu’elle le fasse dans sa situation politique et financière, elle entrera gratuitement en possession de la ligne et de ses dépendances quatre-vingts ans après l’ouverture à l’exploitation. Cela est très loin.

« Les travaux, disent les statuts, devront commencer au plus tard le 16/28 août 1897 et la ligne devra être terminée six ans après que le comité de direction aura été complètement constitué et que les terrains nécessaires auront été livrés à la Société. » Le chemin de fer devrait donc être achevé en 1903 ; bien que les travaux aient été inaugurés en août 1897, ce délai de construction paraît un peu court en présence des difficultés exceptionnelles que rencontrent les travaux.

D’après un avant-projet arrêté au début de 1897, la ligue de Mandchourie, d’Onon où elle se détache de l’ancien tracé, à Nikolsk, où elle le rejoint, compterait 1 9251 kilomètres dont 1 425 sur le territoire de l’Empire du Milieu, formant le chemin de fer de l’Est chinois, et 495 en territoire russe. La distance totale par voie ferrée de Tcheliabinsk à Vladivostok serait donc, en suivant cette voie, de 6 107 verstes au lieu de 6 961 par l’ancien tracé. Mais cet avant-projet établi sur des levés géographiques se trouvera plus ou moins modifié, et sans doute allongé.