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universelle, cette transposition serait entièrement supprimée.

Dans ce système le changement de quantième s’opérerait simultanément dans le monde entier à l’instant précis où sonnerait minuit à l’horloge de Greenwich ou à celle de Paris. Mais, à ce minuit du méridien initial, il serait, en temps solaire, 5 heures un quart du soir à Mexico, 3 h. 40 à San-Francisco, midi à la Nouvelle-Zélande, 10 heures du matin à Sydney, 9 heures au Japon. C’est à ce moment que les habitans de ces pays devraient opérer le changement du jour civil. C’est à cette heure inaccoutumée, en plein éclat du soleil, que le Japonais, le Néo-Zélandais ou l’Australien devraient passer de la veille au lendemain, d’une date à une autre, dire lundi le moment d’avant et mardi l’instant d’après. Cela n’aurait sans doute rien que de rationnel ; mais les habitudes sociales en éprouveraient une gêne et une désorientation intolérables.

Pour toutes ces raisons, l’heure universelle préconisée par des savans éminens, comme M. Oppolzer (de Vienne), est décidément inacceptable pour le public. Et comme le système directement contraire de l’heure locale l’était aussi, c’est dans un tempérament, un compromis entre les deux régimes opposés et impossibles qu’il a fallu chercher la solution du problème de l’heure. Le système des fuseaux représente cette tentative de conciliation.

Les fuseaux. — On connaît maintenant tous les élémens du problème, les circonstances qui ont donné naissance au régime des fuseaux et les conditions auxquelles il doit satisfaire.

Il reste à voir comment il y satisfait précisément.

Le premier auteur de cette réforme est M. Sandford Fleming, le célèbre ingénieur du « Canadian Pacific. » Il avait été vivement frappé des inconvéniens et de la confusion des heures locales dans le service des immenses voies ferrées qui traversent le continent américain. On n’y employait pas moins de 75 heures différentes. Une réforme était urgente. M. S. Fleming l’avait conçue dès 1876 ; il acquit à ses vues le « Canadian Institute » en 1878 et 1879 : il réussit à les faire accepter par les administrations des chemins de fer des États-Unis et du Canada en 1883. La « General Railway Time Convention » date, en effet, du 18 octobre de cette année. M. Fleming ne se contenta point de ce premier succès. Il étendit sa propagande jusqu’en Europe. Au Congrès de géographie réuni à Venise en 1881, il proposait de généraliser le système