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L’ordonnancement des dépenses appartenait, avant 1883, au comité des appropriations ; depuis lors, une part importante de cette besogne est dévolue au comité des rivières et ports ; en 1886, une autre partie a été attribuée à divers comités permanens. Les bills, une fois votés, sont envoyés au Sénat, où le comité des finances s’occupe des recettes, et celui des appropriations, des crédits à accorder. Si le Sénat introduit des amendemens, les bills amendés retournent à la Chambre qui, en général, les rejette. Une commission, composée de trois sénateurs et de trois députés, se réunit alors et parvient le plus souvent à se mettre d’accord sur un compromis.

Les communications entre le pouvoir exécutif et le Parlement sont nulles dans ce système, qui, par une conséquence naturelle, aboutit à des écarts énormes entre les recettes et les dépenses. L’expérience d’un fonctionnaire chargé de percevoir les impôts ou d’assurer la marche des divers services ne peut être mise à profit par les députés que s’ils le font directement comparaître devant eux. Le Parlement n’entend pas un ministre compétent développer devant lui la série d’informations, considérée ailleurs comme nécessaire à l’établissement du budget. Des députés soumis tous les deux ans à la réélection, fréquemment changés, emploient à l’élaboration de plans budgétaires le temps qui devrait être consacré à la discussion de ces plans préparés au préalable, si bien qu’un budget de plus de 400 millions de dollars se vote parfois en dix jours.

Si, en dépit de cette organisation défectueuse, les États-Unis ont eu pendant vingt-huit ans des excédens budgétaires, dont le plus faible a été de 2 millions et le plus fort de 145 millions de dollars (1882), c’est à la prodigieuse vitalité du pays qu’il faut l’attribuer. C’est grâce à elle qu’en 1890, le revenu des douanes a dépassé de 48 millions celui de 1885 ; que le « surplus » en 1892 a été de 10 millions, en dépit d’une diminution des recettes douanières et d’une augmentation des pensions. Les habitudes dépensières de la population ont maintenu à un chiffre élevé, le produit des taxes de consommation, supportées d’autant plus volontiers par elle qu’elle ne paie guère d’impôts directs et qu’elle ignore les charges militaires. Il n’en est pas moins certain que le système budgétaire des États-Unis leur a coûté et leur coûte des sommes considérables, qu’une organisation plus rationnelle leur permettrait d’épargner. Mais, comme le dit M. .lames Bryce dans son bel