Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 148.djvu/377

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

a confiance dans le succès. « Je crois aux conversions. Celles de Mathieu de Montmorency, de Sosthènes de la Rochefoucauld, même du rude Fitz-James me paraissent sincères. Aussi je me sais bon gré d’avoir été très aimable pour Mme Sosthènes, lorsqu’elle est venue chercher hier l’almanach que, depuis le mois de janvier 1815, je suis en possession de lui donner tous les ans… Les déblatérations de Pozzo m’indignent et me baillent un peu martel en tête ; il y a quelqu’un derrière lui… Pour rester sur la bonne bouche, la lettre de l’évêque de Samos est excellentissime. Qu’on te connaisse, mon ami, qu’on te connaisse, c’est tout ce que je demande. » A cette satisfaction du Roi, il y a cependant une ombre. Son Elie est de nouveau souffrant : « Je ne t’en exhorte pas moins à aller à la bataille. Fais ce que dois, advienne que pourra. » La bataille est prochaine. Mais, une question se pose. L’engagera-t-on à la Chambre des Pairs d’abord, ou à celle des députés ? Le Roi consulté répond : « Dans mon humble opinion, je crois qu’il faut commencer par la Chambre des députés. La victoire remportée là nous l’assure ailleurs et je ne suis pas très sûr que, remportée au Luxembourg, elle ne nous fût pas plus nuisible qu’utile au Palais-Bourbon. L’exemple de l’Angleterre ne prouve rien. La Chambre des Pairs y fut toujours, sauf le temps du Long Parlement, comptée pour beaucoup. Ici, j’ai toujours peur qu’on ne la traite de superfétation. » L’avis du Roi prévaut. Le même jour, 10 février, le président de la Chambre des députés est averti qu’elle recevra, le lundi 14, une importante communication du gouvernement.

Durant les trois journées qui suivent, le Roi n’est préoccupé que de la santé de « son fils » et que de l’accueil qui sera fait à la loi par les Chambres, par la France, et par l’Europe. Il a chargé Richelieu d’aller féliciter en son nom le nouveau roi d’Angleterre, George IV, à l’occasion de son avènement. Il veut que l’envoyé royal emporte à Londres une copie du projet et qu’il la montre à qui voudra la voir. De même, il entend que son ministre des Affaires étrangères en communique sans retard des exemplaires à ses agens à l’étranger. En ce qui touche Decazes, il lui prodigue sa sollicitude avec plus d’ardeur qu’il ne l’a jamais fait. Il le sait absorbé par la rédaction de l’exposé des motifs. « Tout va être fatigue pour toi d’ici à lundi et ce jour-là n’en sera pas un de repos… Je voudrais que dès lundi, en sortant de la Chambre, tu allasses à Madrid, pour y passer tout le mardi et ne