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acide phosphorique, et c’est là un renseignement des plus précieux ; le commerce offre, en effet, aujourd’hui, l’acide phosphorique à si bas prix qu’aussitôt qu’on trouve moins d’un millième, il faut se hâter d’acquérir et de répandre des phosphates dont la nature doit être appropriée aux sols qui les reçoivent[1].

En général, les terres provenant de la désagrégation des roches primitives sont pauvres en acide phosphorique ; la culture de la Bretagne, celle du Limousin, ont été transformées par l’emploi des phosphates. Les terres d’origine volcanique, au contraire, sont riches en acide phosphorique, et son épandage est généralement inutile. Bien que l’analyse décèle les phosphates dans toutes les terres d’alluvion, ils y sont en proportions si variables qu’il y a toujours avantage à y essayer les engrais phosphatés.

La potasse est bien plus répandue que les phosphates ; cependant elle fait généralement défaut dans les terres calcaires et dans les sables, où les engrais potassiques ont bien plus de chance de réussir que sur les terres argileuses.

C’est encore à l’analyse chimique qu’il faut avoir recours pour connaître les causes qui, accidentellement, amènent la stérilité. Vœlcker, longtemps chimiste consultant à la Société royale d’Angleterre, en a signalé un cas intéressant. Un cultivateur hollandais acquiert un domaine, provenant du dessèchement du lac de Harlem, qui n’avait fourni jusqu’alors que de médiocres récoltes. Espérant élever ses rendemens, le nouveau venu attaque vigoureusement la terre avec de puissantes charrues et aboutit à un échec complet ; ses récoltes ne sont même plus médiocres, elles sont nulles. Très embarrassé, il adresse un échantillon de terre à Vœlcker, qui n’eut aucune peine à y découvrir une forte dose de sulfate de fer. Celui-ci provenait de l’oxydation de la pyrite blanche, sulfure de fer très altérable, répandu par places dans le sous-sol du domaine nouvellement acquis. Tant que les labours n’avaient été que superficiels, cette pyrite, n’étant pas arrivée à l’air, n’avait pu donner naissance au sulfate de fer, très vénéneux aussitôt qu’il se trouve dans le sol en proportions sensibles, mais les labours profonds ayant mélangé la pyrite à la couche arable, la pyrite s’était oxydée à l’air, et l’action corrosive du sulfate de fer avait détruit la végétation. En chaulant,

  1. Voyez la Revue du 15 août 1894, ou les Engrais et les Fermens de la terre 1 vol. in-12 ; chez Rueff et Cie.