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Quand le calcaire est terreux, il participe des propriétés de l’argile ; comme elle, il se délaie dans l’eau, mais sans former des masses aussi compactes, aussi bien soudées, de telle sorte que, lorsque l’eau qui y est contenue se gèle, des plaques se soulèvent ; par la dessiccation, les particules du calcaire deviennent indépendantes et le vent les entraîne aisément ; pendant l’été, les feuilles des arbres de la Provence calcaire sont couvertes de poussière. Le calcaire dur est souvent fendillé, l’eau le traverse facilement, et les plantes y pâtissent du manque d’humidité. L’humus enfin est surtout intéressant par l’énorme quantité d’eau qu’il peut absorber : il forme une véritable éponge, mais il retient l’eau avec une grande énergie, de sorte que toute celle qu’il renferme n’est pas utilisable par la végétation. Quand on sème des graines de même espèce dans du sable, de l’argile, du calcaire ou de l’humus, puis qu’après avoir bien humecté pour assurer la levée, on abandonne les jeunes plantes sans aucun arrosage, on les voit se flétrir d’autant plus lentement que l’approvisionnement d’eau des divers élémens constitutifs de la terre a été plus considérable ; elles se fanent plus vite dans le sable que dans l’argile, plus vite dans l’argile que dans l’humus. Si, au moment où les plantes s’inclinent, puis se couchent, on détermine l’humidité restante dans ces diverses matières, on reconnaît que le sable a cédé aux racines toute l’eau qu’il renfermait, tandis que l’argile, et surtout l’humus, retiennent encore des quantités d’eau notables, que les jeunes plantes ont été incapables de leur arracher ; quoi qu’il en soit, la fraction de l’eau totale que ces derniers élémens mettent à la disposition des végétaux est considérable, et, ainsi qu’il vient d’être dit, ils résistent bien mieux à la sécheresse dans les terres argileuses ou humifères que dans les sables.

Quand on délaie de la terre dans de l’eau distillée, on voit l’argile rester en suspension et le sable tomber au fond ; au premier abord, on ne conçoit pas comment les élémens disparates dont la terre est formée résistent à l’action de l’eau qui constamment s’infiltre dans les profondeurs, ou ruisselle à la surface ; comment l’argile et le calcaire ne sont pas entraînés, laissant seulement en place le sable et l’humus.

Cet effet ne manquerait pas de se produire si l’argile ne prenait dans la terre la forme coagulée, sous laquelle elle n’est plus entraînable par l’eau ; cette utile coagulation est due à l’action qu’exercent les sels de chaux, et on comprend dès lors l’influence