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troisième banc avec Fontevieux et Pontavice. A leur suite entrèrent les défenseurs, Tronson du Coudray, Chauveau-Lagarde, Julienne, Vilain de Lainville, Labezardel et Pollet, qui s’assirent au bas des gradins où se tenaient leurs cliens : puis vinrent les témoins, parmi lesquels on se montrait Isabeau, premier commis des Affaires étrangères, et les conventionnels Lebreton, Duval, Billaud-Varennes, Bazire. Parurent ensuite les douze jurés. Enfin, l’huissier annonça le Tribunal, et l’on vit les magistrats gagner leurs places, vêtus de noir, la tôte couverte du chapeau à plumes, portant au cou un ruban tricolore : c’était le président Montané, les juges Foucault, Dufriche-Desmadeleine et Rouillon : derrière eux marchaient l’accusateur public, Fouquier-Tinville, et le greffier Fabricius.

Nous n’avons point à résumer ces douze longues séances ; pendant trois jours pleins, le président Montané pressa les accusés de questions, et leurs réponses n’ajouteraient rien, pour la plupart, au récit détaillé que nous avons donné des événemens de la Guyomarais et de la Fosse-Ingant ; nous devons seulement indiquer quels furent leurs moyens de défense, sans cependant ajouter plus de créance qu’il ne convient au compte rendu du Bulletin : c’était un journal quasi-officiel, rédigé sous l’inspiration directe de Fouquier-Tinville, et ce patronage le rend sujet à caution.

M. de la Guyomarais, interrogé le premier s’efforce d’assumer sur sa propre tête toutes les responsabilités. C’est lui qui a reçu la Rouerie sous le nom de Gasselin ; ni sa femme ni ses enfans n’ont connu son hôte que sous ce pseudonyme : d’ailleurs Loisel s’occupa de tout : il fut présent à la mort, présida à l’inhumation. Loisel, on le comprend, étant parvenu à émigrer, pouvait être chargé sans danger.

Mme de la Guyomarais suivit le moyen que venait de lui indiquer son mari : elle ignorait le véritable nom de la Rouerie et ne fit qu’écouter les conseils de Loisel.

Perrin, questionné après elle, se montra aussi lâche qu’à la Guyomarais, ne cherchant qu’à sauver sa tête, assurant les juges de son repentir, compromettant tous les autres. Le médecin Lemasson avoua qu’il avait commis une imprudence en assistant à une inhumation clandestine ; mais il ignorait absolument la qualité du défunt. C’est là ce que répondirent tous les autres : pour eux, l’homme mort à la Guyomarais n’était qu’un hôte de