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religieux. Le même roi signe peu après avec M. Alby et M. Ballot, qui pousse jusqu’au Niger à Boussa, pendant que M. Decœur va jusqu’à Sansanné-Mango sans y traiter, par respect pour l’acte de la mission Fergusson, annexe le Gourma, gagne Say et, en redescendant le Niger, rencontre la première factorerie anglaise à Liaba (1er février 1895). Cette même année, le lieutenant Baud accomplit son fameux tour du Dahomey à la Côte d’Ivoire, par Kirikri, Sansanné-Mango, Gambakha, Oua, en établissant notre protectorat sur toute la route : 1 500 kil. en 77 jours. Une série d’expéditions nous donnaient les Mahis, Bouaye, le Gourma et tout le nord-est de la boucle du Niger (Liptako, Aribinda, Yatenga). Le capitaine Toutée, parti du Dahomey en décembre 1894, atteignait Boussa, Tchaki, Badjibo, remontait le Niger jusqu’à Tibi-Farca, pays soumis au Gogo, déjà vassal de la France ; il redescendait le fleuve après avoir fondé le fort Arenberg à Badjibo. Le gouvernement anglais protesta : Tchaki était au sud du 9e parallèle ; Badjibo en aval de Liaba, poste anglais. Nous avions des résidens dans les deux villes ; les premiers, nous occupions le pays de façon effective. Nous avons évacué, montrant ainsi notre respect du droit et des engagemens diplomatiques.

L’année suivante, le triomphant voyage du lieutenant Hourst aboutissait à la signature d’un traité avec les Touareg Aouellimiden, dont le chef Madidou avait scrupuleusement tenu sa parole, et à l’établissement du fort Archinard à Boussa (11 décembre 1895-13 octobre 1896). En 1897, le capitaine Baud repartait pour le Gourma et y trouvait le capitaine Voulet, maître du Mossi et du Gourounsi : le Dahomey, la Côte d’Ivoire, le Soudan, forment un tout. En même temps le lieutenant Bretonnet occupait définitivement Boussa ; des résidens avec garnison s’installaient à Bafilo, Kirikri, en un mot sur toute la ligne qui unit Boussa à l’intersection de la frontière est du Dahomey avec le 9e parallèle. Nous occupons tout le pays au nord ; au sud, rien. Les Anglais se sont emparés d’Ilécha, Bérébéré, Boria ; ils ne sont plus qu’à quelques kilomètres de nos postes, au nord même du 9° parallèle.

On ne peut que s’étonner de ces mouvemens de troupes. 5 000 Anglais sur le bas Niger, quand nous n’avons que quelques compagnies entre Saye et Porto-Novo ; des envois incessans de soldats d’Angleterre, de la Jamaïque, des officiers, des canons, des canonnières, un nouveau crédit de 3 750 000 francs, tout cet appareil belliqueux, grandissant au moment même où les