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sont susceptibles d’être étudiés et évalués au moyen d’expériences séparées. C’est le mode général de résolution par courbes de l’équation unique à multiples variables d’un phénomène naturel. En admettant que dans certains cas, une seule expérience de laboratoire soit insuffisante pour représenter le phénomène, une série d’expériences dont chacune aura été instituée pour élucider l’action d’une des composantes du problème le représentera dans son ensemble. Quand, par exemple, on aura mesuré dans un tube de trois ou quatre mètres de longueur la durée de la chute de globigérines dans l’eau de mer, on ne connaîtra évidemment pas toutes les lois de cette chute dans la mer. Il en sera autrement si, après avoir fait l’expérience à la pression ordinaire, on la recommence à des pressions de plus en plus considérables, puis ensuite à des températures différentes, et si chaque fois on note les variations introduites sous l’influence de chacune de ces variables. À supposer qu’on ait bien opéré et expérimenté séparément tout ce que la raison, le simple bon sens, indiquent comme jouant un rôle dans la descente des poussières à travers l’océan, si l’on vérifie d’abord dans un lac, puis dans l’océan chacune des lois découvertes dans le laboratoire, si on constate qu’elles y sont simplement multipliées par un nombre, coefficient constant de grandeur, les critiques seront réfutées. S’il y a désaccord, on est averti de l’influence d’une variable dont on n’a pas tenu compte et il faudra, après l’avoir découverte, l’expérimenter à son tour. Quand tout le travail sera achevé, il en résultera la preuve que, non pas dans une seule expérience prise isolément, mais dans leur série entière, on est bien adéquat à la nature.

C’est ainsi qu’il convient de considérer l’océanographie qui, guidée par l’idée féconde de n’étudier le passé qu’après avoir compris le présent, a introduit la méthode expérimentale dans toute la portion de la géologie relative aux terrains sédimentaires. Elle est donc bien une branche de cette science.

Quand un voyageur, épuisé par la lente et pénible ascension d’une montagne, finit par arriver au sommet, il lui est doux de s’asseoir sur un quartier de roche et, tout en se délassant de sa fatigue, de contempler la plaine qu’il a traversée, la rivière dont il a franchi les méandres et qui, en ce moment, se déroule si nettement sous son regard, et aussi les terrains difficiles ou dangereux, les sables, les marais dont il est sorti après de rudes