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l’Ecole des hautes études tout un enseignement de travaux nécessaires. Il en établit la méthode, en montre l’étendue, en signale les difficultés et les complications. « Un fait est certain, dit-il, c’est que, depuis les origines jusqu’à nos jours, le grec constitue une seule et même langue, dont l’évolution n’a jamais été brusquement interrompue. » — Ce fait, nous ne pouvions alors que l’entrevoir et le noter.

Mais, dès ce temps, le grec moderne nous fut doublement utile. Il nous aida et nous habitua graduellement à lire avec facilité les textes anciens qui nous devinrent ainsi plus accessibles. Réel avantage, puisque l’étude quotidienne des œuvres classiques nous était indispensable désormais. L’hiver fut assez rigoureux en 1847-1848. La neige couvrait le Parnès. Enfermés dans la Visandine, la seule pièce chauffée de la partie de l’Ecole qui nous était réservée, nous travaillions presque sans sortir. C’est là que m’étant donné pour tâche de lire le plus possible de Platon et d’Aristote, je constatai avec joie que je le faisais presque couramment. A partir de mai 1847, le grec moderne nous avait été utile d’une autre et importante façon. Des cours à faire aux Hellènes entraient expressément dans les prescriptions ministérielles, qui n’en révélaient pas, comme on pense, l’intérêt politique. L’ordonnance royale du 11 septembre 1846, signée par M. de Salvandy, instituait une école de perfectionnement pour l’étude de la langue, de l’histoire et des antiquités grecques à Athènes. Tel était le but littéraire, et en apparence unique, de l’institution. Il n’était pas encore parlé, et pour cause, de fouilles, d’épigraphie, d’explorations. En revanche, le ministre, qui se réservait de réviser chaque année le programme, en conseil, y insérait cette clause : que l’Ecole d’Athènes pourrait ouvrir des cours publics et gratuits de langues et de littérature française et latine, et ses membres, professer dans l’Université et les écoles grecques tous les cours compatibles avec leurs études. — C’est ce que Sainte-Beuve avait souhaité, dans le Journal des Débats du 26 août 1846, en approuvant le projet de création de l’Ecole, laquelle, d’après lui, devait être « une sorte de concordat littéraire entre notre pays latin et la terre d’Athènes ». La première promotion de l’Ecole se conforma à cette haute pensée. Si les cours aux Hellènes n’eurent lieu que cette fois, seuls les grands événemens de 1848 en furent la cause. Toujours est-il que nos successeurs n’ont été ni tenus, ni invités à remplir ce genre d’obligations.