Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 145.djvu/641

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

midi un quart, l’ordre de Ney de se porter à Frasnes lui fut transmis soit directement, soit par l’intermédiaire de Reille ; mais, pour se mettre en marche, il dut attendre l’écoulement de tout le 2e corps qui précédait le sien. La division Jérôme n’ayant guère quitté ses bivouacs, au sud du bois de Lombuc, avant 1 heure, la tête de colonne du 1er corps ne put arriver à Gosselies qu’entre 1 heure et demie et 2 heures. Là, d’Erlon arrêta ses troupes jusqu’au retour d’une forte reconnaissance qu’il avait envoyée de Jumet sur Chapelle-Herlaymont où la présence d’un corps anglo-belge, menaçant sa droite, lui était faussement signalée par des paysans. On ne se remit en marche que vers 3 heures.

Entre 4 heures et 4 heures un quart, la moitié de la colonne avait dépassé la Voie Romaine, quand d’Erlon fut rejoint par un officier de l’état-major impérial. Cet officier était parti de Fleurus un quart d’heure après le colonel Forbin-Janson, mais, en prenant la traverse de Mellet, il avait gagné près d’une heure sur celui-ci. Il portait un ordre de l’Empereur, prescrivant au comte d’Erlon de diriger le 1er corps sur les hauteurs de Saint-Amand pour fondre sur Ligny.

Ardent à seconder les vues de l’Empereur, d’Erlon fit aussitôt tête de colonne à droite. Malheureusement il avait mal lu cet ordre, griffonné au crayon et que l’officier, pressé de rejoindre le maréchal Ney, avait sans doute laissé peu de temps entre ses mains. L’ordre portait : sur la hauteur de Saint-Amand ; d’Erlon avait lu ou compris : à la hauteur de Saint-Amand. En conséquence, au lieu de prendre la direction Brye-Ligny pour attaquer les Prussiens à revers, il prit la direction Saint-Amand-Ligny de façon à prolonger la gauche de l’Empereur. Le mouvement allait précisément à l’encontre des instructions de Napoléon. Aussi peut-on s’expliquer que l’Empereur, informé qu’une colonne s’avançait, menaçant son flanc gauche, n’ait pas pensé à d’Erlon, qu’il n’attendait nullement sur ce point, et ail pris cette colonne, comme Vandamme l’avait fait lui-même, pour un corps anglais ou prussien.

Pendant que d’Erlon cheminait avec ses troupes sur la Voie Romaine, l’officier de l’état-major impérial continuait sa route dans la direction des Quatre-Bras. Vers 5 heures, il joignit aux environs de Gémioncourt le prince de la Moskowa. Ney s’emporta et sa colère s’accrut encore quand, peu d’instans après, arriva le colonel Forbin-Janson, porteur de la dépêche de Soult, de