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I

Les problèmes bibliographiques ont existé de tous temps. Depuis la Renaissance et l’invention de l’imprimerie, ils se sont multipliés avec la production scientifique et littéraire de plus en plus féconde, de plus en plus variée et, comme nous le verrons plus loin, de plus en plus fragmentaire. On cite les répertoires et catalogues méthodiques — déjà — des bibliothécaires d’Alexandrie, les notices bibliographiques des grammairiens de l’Empire romain.

En 1498, le grand Alde Manuce faisait paraître son catalogue où les connaissances humaines sont divisées en cinq classes : Grammatica, Poetica, Logica, Philosophica, Sacra Scriptura. — L’on peut, en passant, faire observer de quelle curieuse lumière cette division éclaire l’état intellectuel de l’époque. — Mais quarante-cinq ans plus tard, Robert Estienne publiait un catalogue qui était déjà divisé en quatorze classes. Vers la même époque (1545) Conrad Gesner achevait d’imprimer le premier volume de sa Bibliotheca Universalis, dont peut se réclamer toute la bibliographie moderne.

Auprès de Gesner, l’histoire de la bibliographie doit faire une place à l’abbé Drouyn, docteur en Sorbonne, conseiller clerc au Parlement de Paris, qui, à la fin du XVIIe siècle, entreprenait une bibliographie universelle sur le plan le plus vaste. Son répertoire, qui est resté manuscrit, ne compte pas moins de 321 volumes. L’abbé Drouyn s’était associé des savans et des bibliographes français et étrangers. Son œuvre, telle que nous l’avons sous les yeux, contient un grand nombre de découpures de catalogues et de répertoires existans. Son intention était de les fusionner en les complétant. Quand il le pouvait, il donnait l’indication de la place que les livres occupaient dans les bibliothèques, particulièrement dans la bibliothèque du Roi. Tous ces détails sont curieux : l’abbé Drouyn a été le précurseur véritable et complet des promoteurs de l’Office bibliographique international de Bruxelles, dont nous parlons plus loin. Il poursuivait le même but, avec des moyens semblables. Il joignait à la description des livres des notices brèves sur la vie et le caractère des auteurs, sur l’ensemble de leur œuvre. Il transcrivait des morceaux de préfaces contenant des indications intéressantes ou utiles. L’œuvre de l’abbé Drouyn était admirablement comprise ; il l’a poussée très loin, mais il n’a