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comme lui, leur examen devant nous entraîner trop loin. Nous ne donnerons même aucun détail, on le comprendra, sur le projet qui a été soumis aux enquêtes et qui est à l’heure actuelle devant le parlement, après avoir été l’objet de six rapports favorables de ses commissions.

Mais nous pouvons rechercher à l’aide des faits acquis : 1° quelles sont les conditions matérielles nécessaires pour faire de Paris un grand port ; 2° si ce port doit offrir des avantages proportionnés aux dépenses nécessitées par sa création.

Nous examinerons en dernier lieu les critiques soulevées par une œuvre de cette importance et les résultats obtenus à l’étranger par des travaux analogues.


III

La vitesse des eaux de la Seine, très différente en cela de nos autres grands fleuves, la Loire, la Gironde, le Rhône, n’a jamais été excessive, en raison de sa faible pente. D’après le Misopogon de l’empereur Julien, il n’y avait pas de différence entre son débit de l’hiver et celui de l’été. Les bois et les marais qui couvraient presque entièrement son bassin en amont de Paris (dont la superficie est de 43 665 kilomètres carrés) annulaient presque les différences de son niveau.

Si, au commencement de notre ère, ce qui est très probable, la quantité de pluie qui tombait sur ce bassin était la même qu’à l’heure actuelle, le débit du fleuve à Paris devait peu différer de 360 mètres cubes par seconde, au lieu d’osciller comme aujourd’hui, entre 40 mètres à l’étiage, c’est-à-dire au moment des plus basses eaux, et 2 500 mètres cubes dans les grandes crues.

Cet ancien régime du fleuve était particulièrement favorable à la navigation, si bien que, huit siècles après, les pirates Normands pouvaient encore remonter la Seine avec leurs vaisseaux, qui portaient, dit-on, jusqu’à 200 chevaux.

Ce régime a été modifié par les cultures et par les déboisemens, qui ont eu pour premier effet d’assainir et de dessécher le sol. Le creusement des fossés, l’établissement des routes, et en dernier lieu le drainage, ont fait arriver plus vite au fleuve les eaux du ciel, et changé en de grandes oscillations la permanence de son niveau.

La richesse d’une contrée pourrait ainsi sembler, pour qui