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vraiment manqué à ce principe, en 1887 ? Aurait-elle fait une convention explicite avec l’Italie ? Même en l’absence de la note officieuse qui a nié le fait, nous aurions hésité à y croire. Il y a eu sans doute quelque chose, à cette époque, entre l’Angleterre et l’Italie ; quoi ? on ne le sait pas exactement ; mais il n’est pas vraisemblable que ce quelque chose ait revêtu la forme d’une convention. Un échange de vues, c’est possible. Des dépêches aboutissant à des conclusions uniformes et constatant l’identité des intérêts des deux pays dans la Méditerranée, nous le voulons bien. Mais l’Angleterre, quelque pressée qu’elle ait été d’aller plus loin, ne s’y est pas laissé entraîner. L’Italie est certainement le pays du monde qui peut le mieux se passer d’alliances, et n’en est pas moins celui qui en a cherché avec le plus de passion. La lettre même de M. de Robilant nous apprend qu’elle a fait les premières avances à l’Allemagne, en 1882 : qui sait si elle n’en a pas fait à l’Angleterre, en 1887 ? Dans ce cas, l’Angleterre, tout en s’engageant elle-même le moins possible, ou mieux en ne s’engageant pas du tout, n’a sans doute pas mieux demandé que l’Italie crût, pour son compte, s’engager davantage au maintien du statu quo dans la Méditerranée, car ce statu quo lui est favorable. Si l’Italie voulait le défendre, pourquoi l’en empêcher ? A la vérité, on ne comprend pas bien l’intérêt qu’elle peut prendre à ce statu quo que personne, assurément, ne songe à rompre à son désavantage. C’est elle-même qu’on a soupçonnée quelquefois de vouloir y porter atteinte, en Tripolitaine, par exemple ; mais on avait tort évidemment, puisqu’elle en est si éprise, et on aura été très heureux de l’apprendre à Constantinople. S’interdire de faire aucune acquisition et se dévouer pour garantir celles des autres est une politique qu’on ne saurait taxer d’égoïsme. Elle est digne, au surplus, des gardiens de Kassala.

Nous ne croyons, ni dans le passé, ni dans le présent, ni dans l’avenir prochain, à une alliance anglo-italienne. L’Italie devra se borner à celle de l’Allemagne et de l’Autriche, aussi longtemps qu’elle voudra remplir le rôle que M. de Bismarck lui a assigné, pour satisfaire, dit l’article des Dernières Nouvelles de Leipzig, « sa vanité nationale ». Mais il y a, dans cet article, un passage très curieux, très piquant même, où M. de Robilant est loué d’avoir voulu, en renouvelant la Triple Alliance, en 1887, faire un accord supplémentaire avec Londres. L’article assure que M. de Bismarck aurait fait de même, s’il avait été à sa place, et il en tire argument pour le justifier d’avoir suivi ou donné un exemple tout à fait analogue. On se rappelle l’espèce de scandale qu’a provoqué, il y a quelques mois, une autre des