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REVUE DRAMATIQUE

A la Porte-Saint-Martin, la Mort de Hoche, drame en neuf tableaux, de M. Paul Déroulède. — Au Gymnase, les Trois filles de M. Dupont, comédie en quatre actes, de M. Brieux.

La Mort de Hoche est une biographie dramatique en neuf tableaux. Elle appartient au même genre que les drames historiques de Shakspeare ou que les Enfances du Cid (dont le Cid de Corneille n’est qu’un épisode), ou que le Napoléon de Dumas et la plupart de nos Jeanne d’Arc. Ce genre en vaut un autre. Il a ses difficultés propres. En l’absence d’une action continue, d’une intrigue qui relie des tableaux entre eux, il veut beaucoup de mouvement et d’invention dans le détail. Il n’est pas ennemi du sublime, qui est toujours assez difficile à attraper et qui, même atteint, est toujours assez difficile à reconnaître et risque d’être confondu avec le déclamatoire et l’ennuyeux.

M. Paul Déroulède mériterait de faire un chef-d’œuvre. Peut-être le ferait-il, s’il était illettré. Ce qui lui nuit, c’est sa rhétorique. Le chef-d’œuvre, il l’a manqué cette fois encore : mais les qualités morales par lesquelles il mériterait de le faire transparaissent pourtant dans son ouvrage et, çà et là, le soutiennent.

Charmant d’allure, le premier tableau, où Lazare Hoche, sergent aux gardes françaises, se bat avec un mauvais sous-officier réactionnaire et dénonciateur, le traître de la pièce, qui, appliqué à son rôle, suivra Hoche de scène en scène, comme un petit chien. — Au tableau de la Conciergerie, l’appel des condamnés a fait d’autant plus de plaisir qu’il était plus attendu ; et l’on a goûté, chez les victimes, un mélange convenable d’héroïsme, de politesse et de frivolité. — Surtout, l’entrevue de Hoche et de Charette a paru fort belle. Chacun y dit ce qu’il doit dire, et le dit avec beaucoup de force ; et tous deux ont magnifiquement