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150, comme la Diète de Galicie, ou 100, comme la Diète de Moravie. Leur compétence est antérieure à celle du parlement impérial, la déborde et la dépasse ; le Reichsrath et la Délégation n’ont d’attributions que ce qu’ils leur en ont pris. La vraie et primitive législature, celle qui est demeurée la plus active, la plus féconde, la plus puissante pratiquement, pour les dix-sept pays de l’Autriche, c’est la Diète provinciale, le Landtag. Les dix-sept Diètes de pays, ou les principales d’entre elles, sont comme les forteresses où s’abritent les nationalités contre l’envahissement du pouvoir central. Mais peut-on parler de pouvoir central, en Autriche, et d’un pouvoir central « envahissant » ? Ce sont bien plutôt les nationalités qui seraient ici envahissantes ; elles ne se défendent pas, elles attaquent ; et les Diètes de pays sont bien plutôt comme les tours roulantes dans lesquelles elles marchent à l’assaut de l’Empire.

Un pouvoir central ? Mais l’Autriche-Hongrie du Compromis n’est pas un cercle avec un centre ; c’est une ellipse avec deux foyers : Vienne et Budapest. Un pouvoir central ? Mais l’exécutif y réside en trois ministères, avec vingt-deux ministres, et le législatif en trois parlemens avec six Chambres et dix-sept Diètes locales ; — dix-huit, pour ne pas omettre, en Hongrie, la Diète croate d’Agram, qui n’est pas une des moins particularistes. — Le fil d’une administration commune ne relie point ces deux parties de monarchie, que ne relient d’ailleurs ni l’exécutif ni le législatif, tandis qu’un ministère commun jette à peine entre elles quelques points de suture, très faibles et très lâches. Où donc est l’unité de l’Empire ? — Dans l’Empereur. — L’État, c’est lui.

Ce serait lui, Empereur et Roi, l’unité de cette monarchie, faite d’un empire et d’un royaume, même si le dualisme était une vérité, s’il n’y avait dans la vie comme dans les textes qu’un empire d’Autriche et un royaume de Hongrie. C’est lui, à plus forte raison, si le dualisme n’est qu’une fiction juridique ; et peut-être avons-nous montré que, du moins, il n’est pas toute la vérité : que, sous l’Autriche-Hongrie, il y a autre chose, et que c’est là une combinaison qui vaut ce que valent ordinairement les combinaisons. Pour qui ne verrait que l’Autriche une et la Hongrie seule, le Compromis de 1867 n’a pas eu de mauvais effets ; il a donné à la Hongrie, maîtresse d’elle-même, le moyen d’accomplir des progrès étonnans. Mais justement on ne peut pas voir l’Autriche une. Entre l’Autriche une et la Hongrie, l’acte préparé par