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fondamentales découle aussi logiquement que possible l’organisation politique et administrative de la monarchie austro-hongroise, par deux constitutions : l’une autrichienne, l’autre hongroise. Le Compromis institue des affaires communes : il y a, en conséquence, un ministère commun, qui siège à Vienne. Le Compromis déclare communes trois affaires : la diplomatie, l’armée, les finances : il y a, en conséquence, dans le ministère commun, trois départemens : affaires étrangères, guerre, finances. On ajoute officiellement : de l’empire, il faudrait ajouter : de l’empire-royaume ou dire : de la monarchie. Mais il reste en dehors du Compromis des affaires qui ne sont point communes, dont les unes sont particulières à l’Autriche, et les autres, à la Hongrie. En conséquence, deux ministères encore, l’un à Vienne, cisleithan ou autrichien ; l’autre à Budapest, transleithan ou hongrois. Et détail à noter : le ministre commun des affaires étrangères est en même temps ministre de la Maison impériale et royale, et le ministère cisleithan ne compte pas de ministre de la Maison impériale autrichienne ; mais dans le ministère transleithan figure un ministre du cabinet ou de la Maison royale, ministre ad latus, quand le roi réside dans sa capitale hongroise.

Le pouvoir exécutif est ainsi exercé par l’empereur-roi, persona duplex, et trois ministères : un qui est commun et qui ne comprend que trois membres : deux qui sont particuliers, le premier à l’Autriche, avec neuf membres, le second à la Hongrie, avec dix. En tout, pour une monarchie d’une quarantaine de millions d’âmes, vingt-deux ministres. Un seul, le ministre impérial et royal des affaires étrangères, peut se flatter d’avoir juridiction pleine et exclusive sur l’ensemble, Autriche et Hongrie ; il est le seul qui ne soit pas doublé ou triplé. Ses deux collègues du ministère commun le sont : le ministre de la guerre de l’empire, par un ministre de la défense nationale en Autriche et un en Hongrie ; le ministre des finances de l’empire, par un ministre des finances autrichien et un ministre des finances hongrois.

Nous ne pouvons sans quelque effort, nous Français, et en général, nous Latins, nous habituer à cette complication. On raconte que, lorsque le roi Humbert rendit visite à l’empereur François-Joseph, au deuxième ministre des finances qu’on lui présenta, il ouvrit de grands yeux, au troisième, il les dilata ; au deuxième ministre de la guerre, il fronça le sourcil, au troisième, il se mit à rire : « Je m’explique à présent, dit-il en se penchant vers