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Une autre œuvre exécutée par Rubens pendant son séjour en Angleterre avait été offerte par lui à Charles Ier, c’est le tableau de Minerve protégeant la paix contre la guerre, qui, ayant été vendu après la mort du roi avec ses collections, fut au commencement de ce siècle racheté en Italie et donné en 1828 par le duc de Sutherland à la National Gallery à laquelle il appartient aujourd’hui. La peinture, qui dans ces diverses pérégrinations a subi mainte dégradation et beaucoup noirci, est également une allégorie pure. Par les sombres couleurs dont il a revêtu les figures personnifiant la guerre, et qu’il a reléguées au second plan, Rubens a cherché à faire mieux ressortir encore les tonalités joyeuses dont il a paré l’Abondance et les Bienfaits de la Paix qui s’étalent au premier plan de la composition.

Pour en finir avec cet exposé sommaire de la mission diplomatique confiée à Rubens, il convient d’ajouter qu’à la suite de la conclusion du traité entre la cour d’Angleterre et celle d’Espagne, il avait été question de désigner l’artiste pour remplir à Londres la charge de résident, après le départ de Coloma rappelé en Flandre. Mais quoique les membres de la Junte fussent unanimes à reconnaître les services qu’il avait rendus, il leur avait paru difficile, ainsi que le disait le comte d’Ouate au cours de la délibération, « de donner le titre de ministre de Sa Majesté à un homme vivant du travail de ses mains. » Le secrétaire Jean de Nicolade fut donc nommé à sa place. Mais tout en demeurant à Anvers, Rubens ne laissa pas de s’occuper de politique, probablement sur la demande de la princesse Isabelle, car à la date du 17 novembre 1631, nous relevons dans les comptes de la Trésorerie des Flandres, comme ayant été versée au peintre, une nouvelle allocation de « 500 livres, pour être employées en affaires secrètes dont n’est besoin de faire plus ample déclaration. » Il est fort douteux, au surplus, que Rubens eût accepté de quitter de nouveau Anvers, bien que certainement sa nomination comme résident eût été fort bien accueillie à Londres où il avait laissé les meilleurs souvenirs. Répondant à une lettre du 6 avril 1631, dans laquelle Philippe IV parlait à la princesse Isabelle de la possibilité de le renvoyer en Angleterre, au cas où elle jugerait que sa présence pourrait y être utile, la Gouvernante des Pays-Bas écrivait à son neveu qu’elle avait renoncé à confier à Rubens une nouvelle mission, « l’occasion ne s’en était pas présentée. Elle n’avait pas d’ailleurs