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religieuse en Allemagne, mais encore du maintien de la paix générale.

A cet égard, Mgr Galimberti avait rapporté à Rome des impressions très optimistes. Comme on lui demandait s’il avait trouvé encore des traces de la surexcitation que les bruits de guerre avaient provoquée à Berlin durant les mois précédens, il avait répondu que le prince de Bismarck lui avait tenu le langage le plus pacifique, déclarant que jamais l’Allemagne n’attaquerait la France, car elle n’avait rien à attendre d’un nouveau conflit. Elle aurait, à la vérité, presque toutes les chances d’en sortir victorieuse ; cependant la lutte pourrait tourner aussi à son désavantage ; la Prusse retomberait alors dans les conditions humiliantes qui lui avaient été infligées au début de ce siècle. L’Empereur, l’Impératrice, avaient parlé à l’envoyé pontifical dans le même sens, ainsi que la Princesse impériale, qui avait dit que, sans doute, il y avait un parti à Berlin qui poussait à la guerre, mais que le gouvernement lui résistait et était très décidé à ne pas se laisser dominer par de pareilles impulsions.

Rien n’avait été négligé, afin de rehausser, aux yeux du représentant du Saint-Père, l’importance des faveurs spéciales dont il avait été l’objet. Il avait été convié à souper au palais avec les souverains. Au moment où on se levait de table, l’impératrice Augusta lui dit : « Regardez bien cette table, monseigneur, c’est une table historique, car c’est aujourd’hui la première fois qu’un envoyé du Pape est venu s’asseoir à la table d’un roi de Prusse. » ¬¬¬

V

L’impression produite au Palais apostolique par de telles paroles fut vive ; elle était propre à empêcher le Saint-Père de prêter une oreille bien complaisante aux plaintes qui lui parvenaient de divers points de l’Allemagne au sujet des graves inconvéniens auxquels l’Eglise catholique en Prusse devait s’attendre, si l’Anzeigepflicht figurait dans la nouvelle loi religieuse, dans les conditions que Mgr Kopp n’avait pas réussi à faire écarter par la Chambre des seigneurs. Cependant la plupart des évêques et les chefs de la fraction du Centre ne partageaient pas, tant s’en faut, le sentiment de Mgr Galimberti sur la valeur des nouvelles concessions que le Saint-Siège se flattait d’avoir obtenues du gouvernement prussien en matière religieuse. Des doléances multiples parvenaient au Pape, concernant les graves dommages