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les honneurs dus au souverain : Le peuple, et à l’étranger, avec un mépris de souverain : la populace, était hostile. A Rome, le fanatisme religieux s’y ajoutait. Le général Duphot, qui se trouvait de passage dans la ville et que l’on suspectait de cabales avec les révolutionnaires romains, fut tué dans une bagarre, ainsi que l’avait été Basville au commencement de la Révolution. Le Directoire, qui cherchait une occasion de rompre le traité de Tolentino, saisit celle-là. Bonaparte fut chargé de rédiger les instructions que le Directoire donna, le 11 janvier 1798, à Berthier, général en chef de l’armée d’Italie. « L’honneur de prendre Rome vous est réservé, » ajouta Bonaparte dans une lettre particulière… Faites-vous rendre compte de la situation de nos finances en Italie et faites argent de tout, afin de pouvoir sustenter votre armée. » Berthier comprit à demi-mot et répondit : « Vous n’avez pas observé qu’en m’en voyant à Rome vous me nommiez le trésorier (de l’expédition d’Angleterre) ; je tâcherai de remplir la caisse. » Le 10 février, il investit Rome ; le 15, il proclama la république romaine ; et le 7 mars, le ministre des finances de cette république signa une convention par laquelle Rome s’engageait à livrer quinze millions trois cent mille francs en espèces, cinq millions en biens nationaux, trois millions en fournitures militaires, plus l’entretien de l’armée, charges qui s’ajoutèrent aux 35 millions payés par le pape après Tolentino. Ce pays aura payé 77 millions, écrivait un des commissaires civils du Directoire, Daunou.

Ce fut aussi pour nourrir l’armée d’Angleterre et remplir les arsenaux, que le Directoire, dans le même temps, envahit la Suisse : entreprise, à la fois de prosélytisme, de politique, et de fiscalité. La Suisse était un foyer de conspirations de royalistes et d’Anglais : il était nécessaire d’y mettre ordre. La Suisse tenait les routes de l’Italie ; il était nécessaire de les occuper. Rome passait pour avoir un trésor considérable : il était expédient de s’en emparer. Le prétexte fut de protéger les pays sujets contre les cantons suzerains, les Vaudois contre les aristocrates de Berne. Une propagande fortement nouée par Mengand à Bâle, Desportes à Genève, Mangourit dans le Valais, prépara l’action militaire. Dès que la révolution serait mûre, l’armée française interviendrait. Il s’agissait de donner en Suisse une seconde représentation du drame mené, en septembre, par Bonaparte à Venise. Brune fut chargé de l’opération. Brune était un ancien gazetier, qui passait