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y avait amené de quatre lieues, par l’aqueduc d’Arcueil, l’eau des fontaines de Rongy dans des réservoirs voisins de la Grotte de Polyphème, restaurée de nos jours. Cependant Marie de Médicis était à peine établie dans son palais qu’elle le quittait en 1617, à la suite du meurtre du maréchal d’Ancre et du pillage de son hôtel. Son exil et sa captivité à Blois l’ayant pour quelque temps éloignée de Paris, elle venait d’y rentrer après l’accord de Brissac conclu entre elle et son fils, par l’intermédiaire de Richelieu, le 12 août 1620. Installée de nouveau au Luxembourg, elle avait résolu d’orner de peintures la grande galerie disposée à côté de ses appartemens de réception. Les parois de cette galerie qui devaient être décorées présentaient une surface considérable et vers la fin de 1621, le trésorier de Marie de Médicis, Claude de Maugis, abbé de Saint-Ambroise, avait été averti par le baron de Vicq, ministre des Flandres espagnoles auprès du roi de France, de la convenance qu’il y aurait à confier ce travail à Rubens, comme étant le seul artiste de cette époque capable de mener à bien une entreprise aussi importante. L’abbé de Saint-Ambroise passait pour s’y connaître en peinture et il s’entremit auprès de la reine pour lui faire approuver le choix de Rubens. Celui-ci, prévenu de cet honneur, alla prendre congé de l’infante Isabelle, qui non seulement lui donnait son agrément, mais le chargeait de remettre de sa part à Marie de Médicis une petite chienne portant un collier garni de plaques émaillées. Nul doute que, dès lors, la princesse, devenue par la mort récente de son mari gouvernante des Flandres, n’ait en même temps prié Rubens, en qui elle avait une extrême confiance, de ne rien négliger pour se rendre compte des dispositions de la cour de France et pour nouer toutes les relations qui lui sembleraient utiles afin d’être exactement informé de ce qui s’y passait.

Dès le 11 janvier 1622, une lettre de Fabri de Peiresc à son ami le jurisconsulte J. Aleander nous apprend que Rubens était déjà à Paris. Il s’y trouvait encore le 11 février suivant, car, à cette date, Jean Brueghel, écrivant d’Anvers à son protecteur le cardinal Borromée à Milan, l’avertit que Rubens, « son secrétaire »[1], est pour le moment en France où il a été mandé par la reine mère. On peut penser que, dès son arrivée, il s’était fait présenter à Marie de Médicis, et qu’avec son usage du monde

  1. A raison de la difficulté que son confrère Brueghel éprouvait à écrire En italien, Rubens voulait bien, en effet, lui servir souvent de secrétaire.