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premiers le mérite de renoncer à ces erremens. Avertis par les résultats que donnait ailleurs l’étude des antiquités préhistoriques et par l’intérêt qu’elle excitait, ils ont inauguré dans leur patrie toute une nouvelle série de recherches, et de recherches qui sont loin d’avoir dit encore leur dernier mot[1].

C’est le musée national de Palerme qui a le premier montré au public quelques-uns des ouvrages de l’industrie des plus anciens habitans de la Sicile. En 1880, M. Salinas publiait, dans les Notizie degli scavi, une relation des fouilles qu’il avait faites dans les cimetières de Parco et de Capaci, à l’ouest de Palerme, cimetières où il reconnut la dépouille de tribus antérieures à la venue des Grecs et des Phéniciens[2]. L’une de ces tombes a été remontée, avec son mobilier funéraire, dans la première cour du musée, dans cette cour charmante où une robuste glycine encadre de son souple branchage et de ses grappes fleuries des monumens divers encastrés dans la muraille, fragmens d’architecture dérobés aux palais normands et jolis bas-reliefs du XVe et du XVIe siècle, qu’éclaire un reflet de la grâce florentine. Au premier étage, deux ou trois armoires renferment les objets que l’on a retirés de ces nécropoles, lourdes poteries grises à décor incisé, instrumens de pierre et d’os. Il y a là aussi des silex taillés qui proviennent du mont Eryx et des galettes de terre cuite, trouvées à la Favorita, tout près de Palerme, qui sont, quoiqu’il faille quelque attention pour s’en convaincre, des essais de sculpture. Cette collection mériterait d’être étudiée ; mais, reléguée comme elle l’est dans un couloir, il y a grande chance qu’elle échappe à l’œil du visiteur. D’ailleurs beaucoup de ces objets n’ont pas un état civil en règle ; on n’est pas en mesure de reconstituer l’ensemble dont ils ont fait partie. A plus forte raison est-on fort embarrassé pour savoir à quel peuple les attribuer. Eryx est dans le pays des Élymiens ; peut-être aussi Parco et Capaci, à moins que, pour ces deux dernières localités, il ne faille songer aux Sicanes.

C’est ailleurs qu’il faut s’adresser, si l’on veut entreprendre une enquête méthodiquement conduite sur la condition première des tribus qui ont devancé les Grecs en Sicile. Il faut faire du

  1. Dès 1877, Cavalluri cherchait à donner une idée de l’importance et du caractère des nécropoles préhelléniques de la Sicile, en publiant le mémoire intitulé : Opere di escavuzione anteriori ai Greci in Sicilia. Il poursuivait son enquête dans deux dissertations postérieures. Thapsos (Palerme, 1880) et Siracusa (Palerme, 1883).
  2. Notizie degli scuvi, 1880, p. 356.