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à cette éducation de la jeunesse dont l’avenir de la patrie dépend. L’Eglise eut sa part dans cette représentation commune, à côté de la magistrature, de l’administration et des corps savans, dans une proportion qui ne lui assurait ni une majorité, ni une influence prépondérante. Ses ministres siégèrent à côté de ceux des autres cultes reconnus, pro tes tans et israélites, partage très significatif qui parlait assez haut pour écarter tout soupçon d’intolérance et toute crainte de la résurrection d’un privilège.

Qu’était-ce donc au fond pour les catholiques que cette loi Falloux, sinon l’application, sur un objet limité, de la double pensée dont j’ai défini la nature en en constatant l’origine : pacification et liberté? L’Église entrait par ses chefs éminens en communauté d’action paisible et amicale avec toutes les autres institutions de la France moderne, à des conditions dont aucune ne rappelait son ancienne domination, et elle acquérait à ce prix la plus précieuse des facultés dont elle était jusque-là dépossédée, celle de graver sur de jeunes âmes l’empreinte de la vérité dont elle est dépositaire. Aussi aux deux points de vue le but était atteint, et le succès obtenu, autant que pouvaient le permettre, dans un pays divisé et agité comme le nôtre, les passions des partis et les vicissitudes des événemens.

On peut se demander alors pourquoi, la voie étant ainsi tracée, et le premier pas ayant conduit à une étape qui en faisait déjà apercevoir et en laissait espérer d’autres plus considérables, le mouvement, au lieu de se prononcer, s’arrêta, subit même un temps de recul, et une discussion s’engagea, pour se prolonger plusieurs années, entre les catholiques eux-mêmes sur des points que l’expérience semblait avoir résolus. Le Père Maumus passe à dessein sous silence cette période pourtant si importante et si animée de la controverse dont il présente le tableau, par le très louable motif que, se proposant un but d’apaisement et de concorde, il ne veut rien dire qui puisse réveiller entre catholiques des querelles aujourd’hui éteintes.

Je m’associe très volontiers à sa pensée, dans la mesure compatible avec la vérité historique nécessaire à l’intelligence des faits. J’aurais d’autant moins de goût à m’étendre sur ces souvenirs, qu’ayant été alors personnellement mêlé dans un rang secondaire aux débats soutenus par un groupe d’illustres amis, Lacordaire, Dupanloup, Montalembert, Falloux et Augustin Cochin, je ne trouve aucun avantage à livrer ces chères mémoires, aujourd’hui