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les tares de chacun, sont à l’affût des jeunes gens d’âge nubile et préparent un mariage pour gagner les cinq ou six repas et les cadeaux de plus ou de moins de valeur que les deux familles doivent leur offrir, sans s’inquiéter des suites des unions auxquelles elles président. Malgré tous les défauts de ces intermédiaires, il est difficile de se passer d’eux, d’abord parce que la coutume réclame leur présence et les tient pour les interprètes du sort, et aussi parce qu’une famille, avec l’absence presque complète de rapports sociaux qui caractérise la Chine, ne connaît bien que ses parens, agnats et cognats, et ses alliés, parmi lesquels il se trouve rarement un jeune homme ou une jeune fille remplissant les conditions voulues. Entre ces conditions de diverses sortes, quelques-unes sont, en effet, fort strictes. Le mariage est interdit, par les mœurs et par la loi, entre agnats à un degré quelconque, sous peine de la nullité du mariage et de la bastonnade, ou même de la mort, suivant le degré de parenté; la même défense existe pour divers parens par cognation et par alliance. Il n’y a pas d’âge fixé ; mais il est rare qu’on marie une fille beaucoup avant douze ans et un garçon avant quinze[1]; la fortune et la condition sociale sont également laissées à l’examen des familles, qui en tiennent grand compte. Enfin les influences astrologiques sont d’importance majeure et, bien que n’ayant aucun caractère légal, les conjonctions défavorables empêchent un mariage aussi strictement que la parenté au degré prohibé; tout homme, en effet, est placé, par suite de l’heure de sa naissance, sous une série d’influences qui se résument en huit caractères ; si les huit caractères du garçon sont en conflit avec ceux de la fille, on ne saurait passer outre; s’ils sont d’accord, on peut célébrer les fiançailles : on voit que, dans tous ses détails, cet engagement dépend d’autres volontés que de celle des principaux intéressés, et est soumis à des considérations étrangères à la personne des jeunes gens.

Ce sont encore les influences astrologiques qui font choisir les paranymphes chargés d’accompagner les deux fiancés; par elles aussi, on fixe les jours et heures propices pour accomplir les rites, ainsi que les points de l’horizon fastes et néfastes pour les prosternemens. Les rites des fiançailles et ceux qui les suivent jusqu’au mariage : sacrifices offerts aux ancêtres par les chefs de

  1. Mais douze ans, comptés à la chinoise, peuvent n’en faire pour nous que dix, et quinze ans peuvent correspondre à treize.