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les Parques filant la destinée de la Reine, la Naissance de Marie de Médicis et son Éducation, dans laquelle Félibien a bien soin de nous signaler « ce jeune homme qui touche une basse de viole, pour signifier comme on doit de bonne heure enseigner à mettre d’accord les passions de l’âme et dès sa jeunesse régler les actions de sa vie avec ordre et mesure. » Nous ne ferons aucune difficulté de confesser que, dans le Triomphe de la Vérité et l’Assemblée des dieux de l’Olympe, un spectateur non prévenu aurait quelque peine à reconnaître le Gouvernement de la Reine et son Entrevue avec son fils. Bien que Rubens eût à y représenter des événemens plus positifs, nous ne goûtons pas davantage ce Voyage aux Ponts-de-Cé, travail d’élève à peine retouché par le maître et dans lequel la reine, montée sur un cheval blanc, est assez ridiculement coiffée d’un grand casque empanaché d’une forêt de plumes; ni surtout cet Échange des deux princesses, composition bizarre où les figures symboliques de la France et de l’Espagne sont symétriquement disposées de part et d’autre. Élevée comme elle l’est au-dessus du sol, la scène affecte je ne sais quel air théâtral et semble une anticipation des divertissemens réglés en l’honneur du grand roi par ses maîtres de ballet. La tonalité générale faite de colorations violacées et bleuâtres, malencontreusement réunies à des rouges assez vifs, aggrave l’étrangeté de cette toile, une des plus médiocres de la série. Mais peut-être la Réconciliation de la Reine et de son fils est-elle plus déplaisante encore. A voir ainsi, à côté de la reine entourée des cardinaux La Vallette et de La Rochefoucauld, tous deux revêtus de la pourpre. Mercure entièrement nu qui, d’un air galant et d’un pas délibéré, s’avance vers eux, porteur du rameau d’olivier, on dirait une véritable gageure, et la robuste carrure de ce gros garçon assez vulgaire rend plus sensible encore l’inconvenance de ce rapprochement. Dans ces figures allégoriques qu’il introduit avec si peu d’à-propos en de pareilles compositions, Rubens ne paraît jamais se préoccuper du style que la Renaissance et surtout l’antiquité ont su donner à ces types de beauté ou de force dans lesquels s’incarnaient pour elles les grâces ou les énergies de la nature. Rien qu’elles soient inspirées de l’Italie, les nudités du maître restent bien flamandes. Qu’il s’agisse de sujets mythologiques ou de sujets sacrés, il prend, sans y regarder de trop près, dans le fonds toujours disponible et vraiment inépuisable qu’il a sous la main, ces fleuves à la carrure massive, ces Christs olympiens,