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ligne ferme, incontestable, sur laquelle appuyer notre action.

A-t-on été plus heureux en ce qui concernait les choses du sud? Là, plus de frontière, un partage des tribus et des ksour. Ce partage fut-il fait de telle sorte que notre influence se pût établir sur les nôtres d’une façon solide? Il ne le semble pas.

Il fut spécifié que les tribus dépendant du Maroc étaient les Mehaïa, les Beni-Guil, les Hamian-Djembâ, les Eumour Sahra, et les Oulad-Sidi-Cheikh-R’araba ; celles qui dépendaient de l’Algérie étaient les Oulad-Sidi-Cheikh-Cheraga, et tous les Hamian, à l’exception des Djembâ. Pour les ksour, deux étaient reconnus marocains, Ich et Figuig, et sept algériens, Aïn-Sefra, Sfissifa, Asla, Tiout, Chellala, El-Abiod et Bou-Semr’oum.

Or, dès que les circonstances nous obligèrent à tourner nos regards vers ces régions, nous songeâmes à les organiser. Aussitôt on constata une situation qui devait se prolonger durant de longues années, qui existe encore, situation toute pleine d’incessantes difficultés. Les tribus se trouvent enchevêtrées les unes dans les autres. Les Amour (Eumour-Sahra) ont leurs magasins de provisions et leurs greniers dans les villages laissés à l’Algérie. Ils en habitent les environs, ils y possèdent la majorité des jardins (Tiout, Aïn-Sefra, Sfissifa). Les Djembâ, fraction des Hamian, campent à l’est des Chafaa, sur notre territoire, emmagasinent à Tiout, Asla, Aïn-Sefra. Les Oulad-Sidi-Cheikh sont divisés, par erreur, en deux groupes, Cheraga (orientaux) et R’araba (occidentaux). Pas plus eux que la cour de Fez ne partagent à ce sujet notre illusion. La tribu se soumet tout entière à nous. L’empereur du Maroc Moulai-Abd-er-Rhaman lui déclare même qu’ancienne raya des Turcs elle est notre sujette. Elle nous paye l’impôt. Cela se prolonge deux ans. L’erreur du traité nous fait alors hésiter, et la scission se produit. Les ksour que l’on reconnaît marocains, Ich et Figuig, sont implantés dans notre sphère d’action. Sfissifa, qui nous appartient, les commande. C’est le désordre. On dirait que ksour, tribus, fractions de tribus ont été tirés au sort. L’installation de notre influence sur ces populations devient alors des plus difficiles. A l’esprit d’indépendance qui les anime s’ajoute, chez les nôtres, le commerce constant des Marocains. Ceux-ci ne relèvent que nominalement de la cour de Fez. En réalité ils ne reconnaissent aucun maître. Ils entravent nos mesures, ils soutiennent, ils suscitent les révoltes, les défections. Figuig est un repaire. D’incessantes