Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 140.djvu/827

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maison de 20 mètres de hauteur, ni moins de 9 mètres carrés à ces puits d’air sur lesquels donnent parfois les cuisines. La coutume est devenue d’ailleurs plus libérale que la loi : au lieu de consacrer seulement à la cour 15 à 20 pour 100 du terrain, ce qui ne permettait pas au jour de pénétrer plus avant que 2 ou 3 mètres dans le logis, les entrepreneurs s’accordent à conserver libre le tiers environ de la place totale dont ils disposent, et les propriétaires, de cette apparente largesse, tirent profit. Le souci de répandre plus abondamment la lumière a fait, depuis une dizaine d’années, prévaloir une distribution nouvelle : l’antichambre se prolonge en forme de galerie, vis-à-vis des pièces de réception et se termine en couloir entre les chambres; une véranda ou bow-window est appliquée sur la salle à manger, dont elle égaie le fond par un embryon de jardin d’hiver.

Ces cages saillantes sont moins une conquête des architectes sur l’administration municipale, ainsi que les premiers s’efforcent de le faire entendre, qu’un empiétement des particuliers sur la voie publique. Le terrain, par eux gagné en l’air, n’enlève rien, il est vrai, à la largeur de la rue; il ne fait pas obstacle au libre passage des piétons, comme les étalages des marchands et les tables des limonadiers qui, par leur accroissement graduel, dépossèdent le Parisien d’une surface chèrement achetée depuis un demi-siècle. Devant les innombrables magasins, cafés ou bazars, qui ont obtenu l’autorisation d’établir des marquises vitrées au droit de leur devanture, à l’effet de mettre à couvert leurs marchandises exposées au dehors, leurs cliens ou leurs consommateurs, le passant infortuné doit, pour continuer sa marche, descendre modestement dans le ruisseau ou traverser la chaussée. N’est-ce pas proprement revenir aux temps où l’on tolérait le commerce sous les auvens? Et n’est-il pas contradictoire de dépenser des centaines de millions en travaux d’édilité et, après avoir élargi les trottoirs, de les abandonner aux riverains à titre de complément de boutique, moyennant une infime redevance de 1 300 000 francs par an, chiffre de la perception réalisée de ce chef?

Une commission s’occupe en ce moment d’étendre, en matière de saillies, les licences des architectes. Quelques-uns d’entre eux protestent contre les règlemens actuels ; ils déclarent que si les maisons manquent d’imprévu, sont ennuyeuses à voir, moulées et pétrifiées dans la routine, la faute en est à l’alignement imposé,