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il affirma le droit divin de la Royauté. « Ce qui est constitutionnel en Prusse depuis des siècles, c’est une royauté autonome qui a cédé, au cours des années, certains de ses droits aux Chambres, mais spontanément, non par contrainte. Les rois de Prusse ne tiennent pas leur pouvoir du peuple ; ils l’ont de droit divin, ce pouvoir est illimité et chaque concession de leur part est un don gratuit. » Elle avait préconisé l’État laïque, il célébra l’État chrétien, lutta contre l’émancipation des juifs, flétrit le mariage civil, « qui rend le prêtre un caudataire de l’officier civil. » Il voulait que le christianisme fût au-dessus de l’État. « Sans un fondement chrétien, la législation ne sera pas régénérée dans la fontaine de l’éternelle sagesse, mais restera sur les sables mouvans des vagues et changeantes idées humaines. »

En matière budgétaire, la Diète professait que le gouvernement ne peut disposer d’aucune somme sans le consentement du Corps législatif, il soutint et fit admettre que « si le gouvernement et la Chambre ne peuvent s’entendre sur le budget, le dernier budget subsisterait jusqu’à ce qu’un accord ait eu lieu ; le consentement de la Chambre ne serait nécessaire que pour l’établissement des impôts nouveaux ou l’augmentation des impôts existans. » Elle avait supprimé les justices patrimoniales privées et les tribunaux d’exception, il considéra cette constitution d’un droit commun comme un malheur. Elle avait admis la liberté de la presse, il eût voulu comme le calife Omar détruire tous les livres, excepté le Coran chrétien. L’imprimerie lui paraissait l’arme même de l’Antéchrist. Elle parlait à tout propos d’humanité, de droit, il célébra la force. « Entre des principes aussi diamétralement opposés que ceux par lesquels l’Europe était ébranlée, ce n’est pas à des majorités parlementaires de quelques voix qu’il appartient de décider. Dans cette lutte, c’est le Dieu qui préside aux batailles qui doit jeter le dé d’airain de la décision. » À la nouvelle que Windischgraetz avait fait fusiller Robert Blum, il dit à Beust, alors ministre à Berlin : « Il a bien fait, quand j’ai un ennemi en mon pouvoir, je l’anéantis. »

« Je considère Bismarck, disait le roi, comme un œuf duquel je veux faire éclore un ministre. » Dans cette pensée, il le nomma d’abord premier secrétaire (mai 1851), et bientôt après titulaire de légation à Francfort (15 juillet). Le nouveau diplomate vint là se convaincre à son tour de ce qu’il aurait pu apprendre du secrétaire florentin « qu’aux places de spectateur on voit le monde