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Autrichiens reprirent l’avantage dans la conférence réunie à Londres sur les affaires danoises, en signant le protocole sur l’intégrité de la monarchie danoise auquel la Prusse refusa d’adhérer. Tour à tour attiré et éloigné par les deux supplians, le Tsar, se décida à imposer une paix qui, sans être trop cruelle à la Prusse, consacrât la prépondérance de l’Autriche. Il dit aux ministres des deux cours : Sur le premier qui tire, je tire ; je serai contre celui qui attaquera, sans y avoir été contraint par une provocation inacceptable. Aucun des deux rivaux ne se souciant d’être celui sur lequel on tire, l’ardeur belliqueuse se calma, et l’on s’en tint à d’interminables notes, répliques, dupliques, tripliques. Mais on ne pouvait pas longtemps se borner à ces hostilités inoffensives ; deux incidens, comme il s’en produit toujours pour dénouer les situations trop tendues, surgirent presque simultanément. Les insurgés expulsés du Schleswig après la journée d’Idestedt s’étaient réfugiés dans le Holstein. Le roi de Danemark et le Tsar demandèrent contre eux à la Diète restaurée, l’exécution fédérale. Dans des circonstances plus graves, la Hesse électorale adressait à la Diète la même demande.

Frédéric-Guillaume, le prince électeur, instruit, intelligent mais despote cupide, tout occupé de constituer une fortune à de nombreux enfans nés d’une union disproportionnée, avait, à l’instar de ses frères princiers, renvoyé les ministres libéraux subis en 1848, et confié les affaires à un ancien président du tribunal prussien, Hassenpflug, gros homme trapu, insolent, dépensier, fanatique d’absolutisme, qui, à peine installé, demanda des impôts sans présenter de budget. Les États refusant, il déclare l’état de siège en vertu d’une loi de 1832, abrogée. Alors les employés refusent leur concours, les trois quarts des officiers donnent leur démission. Grand-duc et ministre sont obligés de fuir. Ils se rendent à Francfort et réclament de la Diète restaurée l’exécution fédérale contre les rebelles. Cette exécution est ordonnée et confiée à l’armée bavaroise.

La Prusse, intéressée au bon ordre dans cette principauté traversée par deux routes d’étapes, liaison entre Cologne et Berlin, ne pouvait rester immobile et indifférente ; le roi, libre de suivre sa pente naturelle, n’eût pas donné le détestable exemple de soutenir une révolte ; mais s’il tolérait l’exécution fédérale par une Diète convoquée sans lui et contre lui, l’Union restreinte croulait. Il sacrifie son devoir de monarque conservateur à son ambition