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dans les années suivantes, grâce à une exportation considérable qui se chiffra en certaines années par 40 millions de gallons, près de deux millions d’hectolitres. Puis, à partir de 1881, la demande européenne cessant tout à coup, voici la crise de surproduction qui renaît. On tente sans succès toutes sortes d’arrangemens ; on impose des contributions aux industriels pour couvrir les déficits de l’exportation qui allège le marché, mais aucune entente n’est durable, car les fabricans ne se font pas faute de refuser la taxe. Ce n’est qu’en 1887 qu’on arrive à organiser le syndicat; il embrasse tout de suite 80 distilleries représentant près de 90 pour 100 de la production spiritueuse aux Etats-Unis, et moins de deux ans après, par une courte guerre de prix, on ruine ou on annexe les derniers établissemens rivaux à Saint-Paul et dans le Kentucky. Tout récemment, la Distilling and cattle feeding Company, qui a succédé au trust en 1893, tombait en faillite sous le poids de spéculations trop lourdes: plus actif que jamais, le monopole industriel ne laisse pas de survivre à cet incident financier.

Deux trusts rivaux dans la seule industrie de l’huile végétale, voilà certes un résultat caractéristique de la centralisation industrielle unie à la division du travail aux Etats-Unis. L’un produit l’huile de lin et n’exploite pas à cet effet moins de 52 établissemens. L’autre, a donné à la fabrication de l’huile de graine de coton, s’est constitué en 1884 sur le modèle du syndicat du sucre, entre soixante-douze sociétés du sud des Etats-Unis : Quarante-neuf manufactures et dix raffineries travaillent aujourd’hui sous sa direction; il s’est annexé les deux célèbres fabriques de saindoux Fairbanks et Wilcox et fait ainsi concurrence aux grands packers de Chicago. Ces deux trusts se sont organisés en sociétés anonymes au cours de leur carrière; d’autres, au contraire, se sont constitués comme tels dès l’origine : le syndicat du cuir par exemple, dont le monopole s’étend sur tout l’est des Etats-Unis, celui du tabac, celui des allumettes. C’est aussi le cas du syndical du caoutchouc, créé en 1892 après bien des essais infructueux par neuf sociétés indépendantes; ses directeurs achètent la matière première en gros dans l’Amérique du Sud, la transportent par bateaux complets et la répartissent entre les usines qui la travaillent; la vente est confiée à une société spéciale de New-York.

Voilà quelques types de syndicats de monopole, et dans chacune de ces espèces, on retrouve une même forme persistante et caractéristique, l’association des entreprises rivales par l’union