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dont on a mené grand bruit dans certains pays étrangers, incident dont on a fort exagéré l’importance, où on a voulu voir un grave échec pour la politique française, et que la note dont nous venons de reproduire le texte a dénoué à notre pleine satisfaction.

L’Empire ottoman traverse une crise dont les circonstances purement politiques sont bien connues, mais dont les côtés financiers méritent aussi d’attirer l’attention, car ce qui reste de solidité à l’Empire turc dépend en grande partie de la fermeté de ses finances. Quant à nous, Français, nous y sommes peut-être plus intéressés que tous les autres, parce que, dans l’ensemble de la Dette ottomane, nos capitaux occupent, et de beaucoup, la proportion la plus large. La France possède en fonds d’État ou en obligations de chemins de fer garantis par l’État près des deux tiers des valeurs ottomanes, soit un capital qui doit être évalué à environ 2 milliards 229 millions ; et, si on ajoute à ce chiffre celui de 250 à 260 millions au minimum qui représente les valeurs industrielles dont nos compatriotes sont aussi porteurs, c’est à plus de 2 milliards et demi en chiffres ronds qu’il convient d’estimer le montant de la dette publique ou privée que la Turquie a contractée vis-à-vis de nous. Une telle situation ne pouvait pas nous laisser indifférens aux menaces qui se sont produites dans ces derniers temps contre les finances turques, non pas qu’elles aient été compromises, il ne faut rien exagérer, mais parce qu’elles ont inévitablement subi la réaction des événemens politiques, et qu’au moment même où on demandait au sultan des réformes, la nécessité de lui assurer, pour les accomplir, des ressources nouvelles est apparue à tous les yeux. On a beaucoup parlé d’un emprunt probable, ou même inévitable, qui mettait en cause le crédit de l’Empire ottoman. Il était donc de l’intérêt de tous que ce crédit restât intact, et qu’il fût même accru. Que fallait-il pour cela ? Le problème devait se poser à la diplomatie : elle s’est efforcée de le résoudre en étendant autant que possible la garantie actuellement donnée à la Dette ottomane. Nous avons parlé du décret de Moharrem. C’est un décret que, au moins dans la forme, le sultan a rendu motu proprio, à la suite d’un arrangement personnel et direct avec ses créanciers. Au moins dans la forme, disons-nous, parce qu’à la suite de la dernière guerre et au cours des délibérations du Congrès de Berlin, on ne l’a pas laissé absolument libre de ses déterminations, et qu’on lui a imposé l’obligation d’en prendre d’efficaces, faute de quoi, on les prendrait à sa place. La suspension de ses paiemens faite, en 1875, par le gouvernement turc avait été une des causes principales des événemens politiques et militaires