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REVUE MUSICALE

:De l’exotisme en musique, à propos d’un nouveau concerto de M. Camille Saint-Saëns.

Au Conservatoire d’abord, puis au Châtelet, M. Diémer vient de jouer, — en grand virtuose, — un nouveau concerto pour piano de M. Saint-Saëns, celui que l’auteur interpréta lui-même le soir de son glorieux cinquantenaire. Il n’y faut pas chercher la grandeur et la puissance de certains autres concertos de M. Saint-Saëns : celui en sol ou celui en ut. Du premier morceau les thèmes valent surtout par la grâce et l’amabilité ; et la fin m’en a paru délicieuse de paix et de douceur. Le finale au contraire est un chef-d’œuvre d’éclat et surtout de vitesse. Je n’en connais pas de plus allant, de plus ailé, qui vous porte et vous allège davantage, qui vous donne plus vives, plus enivrantes, la sensation et la joie d’un éternel mouvement dans un espace infini. Symphoniques discrètement, harmonieusement partagés entre le piano et l’orchestre, ces deux morceaux attestent chez le musicien une sûreté désormais infaillible de la pensée et de la main, un naturel et une liberté dans la création, un caractère d’aisance et de jeu supérieur qui n’appartient qu’aux œuvres de maître.

Mais il y a dans la seconde partie de ce concerto quelque chose qui ne fut encore en nul autre et que M. Saint-Saëns, depuis qu’il s’est fait rapsode errant, nous rapporte volontiers de ses courses lointaines. Ce quelque chose est l’exotisme, et c’est de l’exotisme en musique et dans la musique de M. Saint-Saëns que nous voudrions dire un mot.

L’exotisme est le goût et la représentation des choses éloignées et