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fondamentale : « en théorie, principes éminens et qui, plus d’une fois, ont devancé les temps ; en pratique, manque ou défaillance de tous les principes non seulement de dignité, mais parfois même d’équité. » L’auteur dressait ensuite notre bilan médical : « 1° Vanité et orgueil. La première république, sous le consulat de Napoléon Ier, institue l’ordre de la Légion d’honneur. » Notez ce fait : c’est la République française, non Bonaparte, « Italien d’origine », qui a inventé cet ordre de vanité. « La première République, au lieu de créer autour d’elle des républiques sœurs et égales, crée des républiquettes pour en disposer à son gré… par exemple, la Cisalpine, la figure, la Parthénopéenne… Le second empire dirige avec le même orgueil les destinées de l’Europe : il traite l’Italie comme une préfecture française. » Voilà, paraît-il, tout ce que, pendant le second empire, la France a fait pour les Italiens. « Puis, détruisant la république du Mexique, Napoléon y établit un empire avec Maximilien d’Autriche. »… « Tous les poètes français, sans exclure Victor Hugo, appellent Paris le cerveau du monde… » Dans « tous les romans français » se trouve « un concitoyen de Rochefort qui extermine d’un seul coup de sabre douze Allemands ou Italiens en une fois et qui rompt d’un seul coup de poing le crâne à dix Anglais !… » 2° « Intolérance et cruauté. Sous Louis XVI, la populace de Paris immole Foulon et Berthier, etc. » Suit le tableau classique de la Terreur. Dans l’histoire de l’Italie, intolérance et cruauté sont, paraît-il, inconnues. « Aujourd’hui, la France n’est nullement changée. Dans les meetings français, pas une note de paix… Quand une réunion publique, à Paris, ne finit qu’avec des blessés, c’est toujours une bonne fortune. » Le docte sociologue, si bien informé, citait aussi « la volupté avec laquelle Je peuple français assiste aux exécutions capitales. » Puis vient l’autre grand symptôme de notre maladie nationale : « Contradiction entre la théorie et la pratique. La première république française a tué la république vénitienne ; la seconde a étouffé dans le sang la république romaine. Aujourd’hui tous les Français, sans exception, réclament l’Alsace-Lorraine ; mais on ne trouvera pas dans toute la France un seul homme qui accepte que Nice et la Corse réappartiennent à l’Italie ! La troisième république, anticléricale et athée, prend en Orient la protection des chrétiens. » Tels sont les principaux signes de la maladie qui nous menace de trépas. Et cependant l’auteur du cours de sociologie nous est en somme sympathique : « La France, conclut-il, est une grande nation ; dans les sciences et les arts, elle chemine de pair avec les premières nations de l’Europe… La France est, avant tout, un peuple de fortes initiatives ; et c’est pourquoi sa décadence constituerait pour l’Europe