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livre s’adresse. Je me permettrai donc ici de le recommander à M. Léon Bourgeois, qui fut président du conseil ; à M. Combes, le même que l’on vit naguère administrer si libéralement l’instruction publique ; et généralement à tout ce que nous avons, dans l’une et l’autre Chambre, d’adeptes convaincus de la franc-maçonnerie.

On ne saurait non plus les traiter, ces questions éternelles, — et en un certain sens un peu « banales », — d’une manière plus originale et plus personnelle que M. Balfour. Ses raisonnemens lui appartiennent et, même quand il semble qu’on les ait déjà rencontrés quelque part, ils frappent et ils surprennent pourtant par je ne sais quel air de nouveauté. La cause en est sans doute que si son livre n’a rien d’une « confession » ; — les Anglais ne se confessent guère, en public, je veux dire, et qu’ils ont donc raison ! — on n’y saurait méconnaître le résultat d’une sorte « d’examen de conscience ». M. Balfour ne nous fait point confidence de ses « hésitations » ou de ses « perplexités » ; mais il nous fait passer après lui par les chemins qu’il a suivis lui-même pour éprouver la solidité des fondemens de sa croyance. Persuadé, comme notre Montaigne, que « tout homme porte en soi la forme de l’humaine condition », il a voulu que son livre ne dût rien à l’école, mais tout à lui-même, à son expérience intime des questions qu’il y discute. Il a voulu aussi que le mouvement en imitât en son cours celui de ses propres méditations. Et, de là, peut-être, ce que quelques lecteurs, chez nous surtout, y trouveront à reprendre au point de vue de la disposition ou de la composition, qui n’a rien de didactique ou de français, — mais qui n’en est que plus « naturelle », du moins en anglais ; — et, sans jouer sur les mots, de là, cet accent que nous disions : de personnalité, de sincérité, de liberté. M. Balfour a écrit pour lui ; et quand son livre a été fait, il lui a paru que, n’étant pas le premier ni le seul à s’être interrogé sur les Bases de la Croyance, d’autres que lui pouvaient s’intéresser à la réponse qu’il avait trouvée. Car les grandes questions ne varient point quant à leur objet ; mais elles se réfractent en nous selon ce que l’on pourrait appeler notre équation personnelle, ou, si l’on le veut encore, selon la courbure de notre esprit ; et c’est ainsi que l’on en voit surgir dans l’histoire, l’un après l’autre, des aspects vraiment nouveaux.

J’en signalerai plus d’un dans le livre de M. Balfour. Et comme une pareille manière de traiter le sujet non seulement n’exclut pas la digression, mais l’exige, à vrai dire, — si l’on ne veut rien avancer que l’on ne prouve en quelque mesure, — je